Elle estime que des "dysfonctionnements" de la chaîne pénale ont conduit au meurtre de sa sœur, Isabelle Thomas, abattue le 4 août 2014 avec ses parents par son ex-compagnon, Patrick Lemoine, alors qu'elle circulait en voiture à Grande-Synthe, près de Dunkerque (Nord).
Cathy Thomas et son fils, qui n'ont pu "plaider devant une cour d'assises" car le suspect s'est suicidé en détention, ont assigné l'État pour "fonctionnement défectueux du service de la justice". Elle a réclamé ce lundi 10 février à Paris la condamnation de l'État pour "faute lourde" et demande 300.000 euros d'indemnités.
Tout a débuté le 27 juin 2014. Ce jour-là, Isabelle Thomas, professeure de mathématiques de 49 ans déposait plainte contre son compagnon qui avait tenté de l'étrangler. Placé en garde à vue, ce dernier avait été libéré sous contrôle judiciaire avec interdiction d'entrer en contact avec elle, et devait être jugé le 13 août pour ces faits.
Mais il n'avait pas respecté ce contrôle judiciaire, continuant de harceler et de suivre en voiture son ancienne compagne, qui déposait une nouvelle plainte le 10 juillet, puis une main courante le 23 juillet. Convoqué à nouveau, Patrick Lemoine ne s'était pas présenté au commissariat.
Le 4 août, Isabelle Thomas était tuée avec ses parents après une course-poursuite alors qu'elle était au téléphone avec police secours. Arrêté après le triple assassinat, Patrick Lemoine est décédé le 8 octobre 2014 après s'être pendu dans sa cellule six jours plus tôt.
À l'audience, ce lundi 10 février, l'avocate des plaignants Isabelle Steyer a pointé plusieurs "failles" malgré "tous les clignotants" allumés. Elle reproche à l'État trois "fautes lourdes" : un placement sous contrôle judiciaire "inadapté" car ne tenant pas compte de la dangerosité de Patrick Lemoine, une absence de révocation de son contrôle judiciaire, ainsi que des "carences" des services de police le jour des assassinats.
La procureure a estimé que la responsabilité de l'État ne pouvait être engagée pour le premier et troisième motif, mais a laissé à la libre appréciation du tribunal la possibilité de reconnaître une faute lourde pour "l'absence de suite donnée" à la violation du contrôle judiciaire.
"Dans ce dossier, le service public de la justice n'a pas dysfonctionné", a affirmé de son côté le représentant de l'État, Me Alexandre de Jorna, demandant au tribunal de débouter les demandeurs. Le tribunal doit rendre son jugement le 23 mars prochain.