Comment des poupées à caractère pédopornographique ont pu être commercialisées sur Shein ?

Ce lundi 3 novembre, le géant asiatique de l'e-commerce Shein a été "convoqué devant les députés sous quinze jours" après la vente, sur son site, de poupées sexuelles d'apparence enfantine, a déclaré dans un communiqué le rapporteur de la mission d'information sur les contrôles des produits importés en France.

Shein, c'est un site spécialisé à l'origine dans les robes de mariée, lancé il y a 13 ans et qui a connu plusieurs noms comme "ZZKKO", puis "SheInside", avant que celui-ci ne soit raccourci. 

À sa tête, on trouve Chris Xu, un entrepreneur très discret, dont on sait peu de choses hormis que c'est un expert : pas de la mode, mais de l'informatique et des algorithmes. Son talent ? Repérer les tendances, savoir en temps réel ce qui marche sur Internet et le proposer très rapidement aux clients, avec l'objectif de créer toujours plus de nouveautés.

"C'est jusqu'à 9.000 références [de vêtements] chaque jour : cela produit dans un premier temps des petites séries pour après produire en plus grande quantité, lorsque le produit est sûr de rencontrer sa demande. Il est évident que lorsqu'on produit autant, lorsqu'on propose à la consommation autant de produits, on n'est pas du tout dans le sens de la sobriété", résume Gildas Minvielle, directeur de l'Observatoire de l'Institut français de la mode.

Plus de 10.000 fournisseurs

Shein se vante de n'avoir aucune usine à son nom : le site ne travaille officiellement qu'avec des fournisseurs. En l’occurrence, ils sont au nombre de 10.000, rien que pour la fabrication de vêtements. Ce ne sont pas des gigantesques entreprises : souvent des petits ateliers, principalement en Chine, parfois de 5 à 10 personnes.

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"Comme ce sont des ateliers qui travaillent intégralement pour la marque, on peut considérer que ce sont des usines Shein. Leur intérêt, justement, c'est de pouvoir les tenir parce qu'ils n'ont aucune marge de manœuvre. De ce fait, ils sont tenus par Shein et ses contraintes", explique Yann Rivoallan, le président de la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin.

Avec ces contraintes financières et l'obligation de produire pour toujours moins cher, la qualité des produits en pâtit comme les conditions de travail des salariés. De nombreuses enquêtes révèlent que certains employés travaillent en moyenne 75 heures par semaine. Des associations dénoncent une forme d'esclavage moderne.

"Une vitrine en ligne"

Mais le désir de s'étendre et de se diversifier a conduit Shein à ne plus proposer que des vêtements, tout y passe. Électroménager, accessoires, outils de bricolage... Pour vendre encore plus, le groupe chinois est devenu depuis deux ans ce qu'on appelle une "place de marché". Autrement dit, le site ne propose pas juste des produits de sa marque, mais aussi ceux d'autres vendeurs qui se sont inscrits sur le site.

"Shein est une sorte d'étale. Il met à disposition son étale, donc son site, et dit à un ensemble de fournisseurs, de producteurs qu'ils peuvent venir sur le site et vendre leurs produits. C'est une sorte de vitrine en ligne qui permet à la fois d'avoir énormément de références disponibles et surtout, de rendre plus difficile de toute législation. Car Shein permet à un vendeur de vendre un produit, mais elle n'en est pas responsable. Ce n'est pas elle qui le produit", détaille Pierre Condamine de l'association Les Amis de la Terre, qui a enquêté sur le géant asiatique.

C'est ainsi qu'a commencé le scandale des poupées pédocriminelles. Selon Shein, elles ne viennent pas d'un de leurs fournisseurs officiels, mais plutôt d'un de ses revendeurs sur sa place de marché. Le géant chinois nous assure que normalement des contrôles sont faits : tout le monde ne peut pas s'inscrire et vendre ce qu'il veut, nous dit-on.

Mais ce sont lors de ces vérifications qu'il y aurait eu un bug. C'est pris très au sérieux, nous assure-t-on. Sur le site version française, les poupées ont été retirées. Mais d'après des associations de défense des enfants, on peut toujours en trouver sur Shein, mais dans d'autres pays.