"C'est quand même quelqu'un d'intelligent" : une profileuse s'est plongée dans la tête de Cédric Jubillar

C’est une disparition qui depuis plus de quatre ans, tient la France en haleine. Dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, Delphine Jubillar, infirmière de 33 ans et mère de deux enfants, s’évapore de son domicile à Cagnac-les-Mines, dans le Tarn. Aucune trace, aucun corps, aucune scène de crime, le mystère est total.

Mais très vite, les soupçons se tournent vers son mari, Cédric Jubillar, peintre en bâtiment, décrit comme instable, jaloux, accablé de dettes, et blessé par la volonté de Delphine de divorcer. Il nie farouchement toute implication. Pourtant, en juin 2021, il est mis en examen pour meurtre. Il comparaît depuis lundi 22 septembre devant la cour d'Assises du Tarn.

Il y a dans ce dossier beaucoup d’éléments troublants. Pour la première fois, une profileuse a accepté de passer ce dossier au crible. Dans le podcast Enquêtes criminelles, elle réexamine les indices et tente de se mettre dans la tête de l'accusé.

Il a une attitude qui est parfois qualifiée d'un peu hautaine

Emma Oliveira, profileuse

D'abord, il existe des incohérences dans la version de Cédric Jubillar. Il affirme s’être endormi tôt, mais change plusieurs fois de version. Et puis, son comportement après la disparition est jugé étonnamment détaché. "Il a une attitude qui est parfois qualifiée d'un peu hautaine, 'm'as-tu vu' et à prendre plaisir à la médiatisation", rapporte la profileuse Emma Oliveira qui a analysé le dossier. "La médiatisation fait tourner la tête de plus d'une personne et être célèbre le temps d'un moment, ça peut être quelque chose de galvanisant."

Le soir de la disparition, son téléphone portable est par ailleurs étonnamment éteint de 22h08 à 3h53 alors qu’habituellement il ne l'est jamais la nuit. Ce même soir, Louis, le fils du couple âgé de 6 ans, est présent. Un mois après la disparition, il raconte avoir entendu ses parents se disputer le soir. 

Ajoutons à cela les confidences troublantes de son ex-compagne, rencontrée en prison, et qui, pour la première fois dans un documentaire accepte de témoigner. Ces allégations selon lesquelles il lui aurait avoué le meurtre ne convainquent pas la profileuse Emma Oliveira. "C'est quand même quelqu'un d'intelligent, c'est vrai que c'est ce qui ressort, c'est qu'il prend quand même énormément de risques (...) Je pense qu'il est plutôt en train de jouer avec elle et de cultiver un peu cette image de bad boy qui doit lui plaire", estime-t-elle.

Le passage à l'axe, c'est un moyen de reprendre le contrôle de sa vie

Emma Oliveira

Mais quel aurait été le mobile de Cédric Jubillar ? Delphine envisageait de divorcer, projetait de quitter la maison familiale et avait confié à des amis son envie de refaire sa vie. "Il y a certainement, comme dans beaucoup de ménages, un décalage entre l'idéal qu'on s'est fixé de vie, que ce soit conjugal ou familial, et la réalité, analyse Emma Oliviera. Et il s'avère que peut-être que pour Delphine, ce décalage est devenu insupportable et qu'elle a décidé de mettre fin à ce mariage". 

Cédric, lui, se sentait écrasé financièrement et avait peur de perdre la maison. "Ce ne serait pas le premier mari à tuer sa femme, car il ne supporte pas l'idée qu'elle puisse aller être heureuse ailleurs et construire ailleurs, abonde Emma Oliveira. Moi, j'ai toujours dit que le passage à l'acte, c'est un moyen de reprendre le contrôle de sa vie. Donc la plupart des féminicides, c'est reprendre le contrôle de la relation, reprendre le contrôle sur l'autre." Elle nuance : "Mais ça, ça ne reste que des hypothèses, on ne sait pas.

Seulement tous ces éléments ne dont pas des preuves formelles de la culpabilité de Cédric Jubillar. Alors suffiront-ils à convaincre un jury populaire ? Peut-on condamner un homme sans preuves matérielles ? Jusqu’où peut mener l’intime conviction ? Et si l’on se trouvait face à un crime parfait - froidement planifié ? Le verdict est attendu le 17 octobre prochain.

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