Affaire June Hopkins : l'obsession fatale d'une Américaine à Paris

June Hopkins. La police parisienne entend parler pour la première fois de cette Américaine à l'été 2010. Elle aurait tenté de tuer dans un appartement son ex-compagnon français, aidée pour cela de leur fils ainé. Scénario rocambolesque, mais pour le moins inquiétant.

Vendredi 27 août 2010, Grégoire Lautissier, 45 ans, employé d'hôtels de luxe et ancien steward de L'Orient-Express, pousse la porte du commissariat du onzième arrondissement de Paris. Il vient déposer plainte pour tentative d'homicide sur sa personne. Grégoire Lautissier raconte que depuis deux mois, il prête son appartement dans le quartier de la Bastille, à une June Hopkins, 49 ans, Américaine.

C'est son ancienne compagne. Il a eu deux garçons avec elle, mais ne les a jamais élevés. Il ne les connait presque pas. Elle a toujours accouché aux États-Unis, où elle vit. Pour ce séjour, June est venue à Paris accompagnée de leur fils aîné, Brendan, 18 ans. Séjour de retrouvailles qui a dérapé.

Tentative d'homicide avec de l'essence et un sabre

Le 20 août, Grégoire Lautissier s'est aperçu que son ancienne compagne avait fouillé dans ses affaires. Il a demandé des explications. Elle a reconnu avoir photocopié des documents financiers : son avis d'imposition sur la fortune, les actes de donation de son père décédé, un très riche médecin.

Le ton est "monté", indique Grégoire Lautissier aux enquêteurs. "J’étais assis, j'ai senti, en partant du cou, un liquide couler sur mon corps : de l’essence". Grégoire Lautissier dit avoir hésité à déposer plainte, car il ne veut pas causer de tort à Brendan, son fils aîné. Il vit très mal cette attaque et ne dort plus. Il ne comprend pas ce qui a pu se passer, même s'il soupçonne June Hopkins d'être derrière tout ça.

Il avait rencontré cette femme en 1990 alors qu'il était steward sur l'Orient-Express... La jeune Américaine voyageait en solo. Elle disait être séparée de son mari. L'attraction est réciproque. Ils se sont installés ensemble. June est rapidement tombée enceinte de Brendan, mais est repartie aux États-Unis.

Même scénario pour la naissance du deuxième fils, Austin. Grégoire avait des nouvelles, mais n'a plus revu sa compagne et les enfants jusqu'au décès de son père en 2008, dont il a en partie hérité.

Les policiers sont dans l'impossibilité d'entendre June Hopkins et son fils Brendan. Ils ont pris un vol pour Boston juste après l'altercation. L'enquête n'est pas close pour autant. Frédérique Lautissier, sœur de Grégoire, affirme que son frère traverse depuis cette bagarre une mauvaise passe. Il est psychologiquement perturbé. Il est venu vivre chez elle, à Chatou.

Quelques mois plus tard, June Hopkins fait savoir depuis les États-Unis que Grégoire Lautissier l'a abandonnée, elle et ses enfants. Elle écrit à un juge français pour obtenir des pensions pour ses fils et fournit les relevés bancaires et d'épargne dérobés à son ex-compagnon. L'ancien steward, sombre lui dans la dépression. Après dix mois de vérifications, une information judiciaire est ouverte pour tentative d'homicide sur Grégoire Lautissier.

Une seconde tentative, quatre ans plus tard

Lundi 12 mai 2014, Grégoire Lautissier dépose une nouvelle plainte. Il indique avoir découvert sept affichettes placardées sur la porte de son appartement du boulevard Beaumarchais. Il y est traité de "monstre", "coupable", promis à l'enfer. Pour Grégoire Lautissier, seule son ex-compagne a pu écrire ces mots anonymes. La France délivre alors un mandat d'arrêt international est délivré contre June et Brendan.

Mardi 17 février 2015, neuf mois après les mots de menaces, la police et les pompiers sont appelés vers 19h30 à Chatou. Frédérique Lautissier est en état de choc, agressée par un homme et une femme. Grégoire Lautissier, venu à son secours, reconnaît dans l'échauffourée June et Brendan. Les policiers et le juge sont alors persuadés que June Hopkins et son fils, discrètement installés à Paris, sont venus pour terminer leur sale boulot : tuer Grégoire Lautissier.


Mardi 26 mai 2015, Brendan Walsh-Lautissier, 23 ans, conteste devant le juge la première tentative de meurtre de son père. Cette arme, selon lui, n’était qu'un jouet, un accessoire manga qu'il collectionne. Jeudi 30 juillet 2015, June Hopkins est interrogée : elle dit détenir les preuves d'un complot fomenté par Grégoire Lautissier, qui avait, selon elle, pour projet de la tuer avec son fils aux États-Unis. 

Février 2018, après trois ans de détention, la mère et son fils sont remis en liberté. Placés sous contrôle judiciaire, ils en profitent pour s’enfuir. Dix mois plus tard, ils sont arrêtés aux États-Unis. Après un an de procédure, ils sont extradés vers la France. En mai 2022, June Hopkins est condamnée à seize ans de prison, son fils Brendan est, lui, condamné à douze ans.

"La cours d'appel a aggravé la peine. Mais je pense qu'on est passé à côté des sujets purement factuels de ce qui s'est passé en 2010 et en 2015", estime Maître Grégoire Etrillard, avocat au barreau de Paris, avocat de June Hopkins, qui va aller devant la cours de cassation pour demander un troisième procès.

"June Hopkins n'a pas conscience d'être dangereuse. Elle est persuadée d'être la victime", souligne Tiphaine Pioger, journaliste, spécialiste des affaires criminelles, autrice du podcast Home(icides).

"Elle s'est vraiment convaincue du scénario. Elle l'a écrit, elle a convaincu son fils. Il y a une espèce de sincérité dans cette obsession", explique Thimothée Boutry, journaliste au Parisien.

Les invités de l'Heure du crime

- Maître Grégoire Etrillard, avocat au barreau de Paris, avocat de June Hopkins.
- Timothée Boutry, journaliste au Parisien.
- Tiphaine Pioger, Journaliste, spécialiste des affaires criminelles, autrice du podcast Home(icides) sur l'affaire June Hopkins disponible sur toutes les plateformes de podcasts.

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