Le service civique, c'est la possibilité offerte aux jeunes entre et 16 et 25 ans (30 dans certains cas) de réaliser une mission d'intérêt général de six à douze mois, dans une association à objet social culturel ou humanitaire, ou dans une collectivité locale, ou encore dans un collège ou un lycée. Pendant ce service, le jeune est payé par l'État (573 euros par mois) et assuré social. Ce dispositif date de cinq ans. Il progresse gentiment, mais ne concerne aujourd'hui que quelques dizaines de milliers de personnes. Il s'agirait d'y envoyer 350.000 personnes à horizon 2018, c'est-à-dire la moitié d'une classe d'âge.
Sur le papier, c'est une bonne idée d'en étendre le bénéfice à d'autres personnes. Mais on risque de buter sur plusieurs problèmes. L'argent, d'abord. François Hollande a annoncé le déblocage d'un milliard d'euros. On ne sait d'ailleurs pas d'où il vient ce milliard. Selon la Cour des comptes, si l'on engageait un programme de 350.000 volontaires, il faudrait budgéter plus de deux milliards. Il faut ensuite leur trouver des missions utiles et intéressantes. Il y a en effet beaucoup de choses pour favoriser le lien social, l'aide aux personnes âgées, aux handicapés, pour promouvoir la culture, et des postes d'"agents d'ambiance" dans les établissements éducatifs. Tout cela a certainement son utilité.
Mais sur le site de l'agence du service civique, on trouve aussi des intitulés complètement saugrenus : "berger des moutons et des abeilles dans le Rhône", par exemple. Il y a quelques détails : la mission consiste à délacer les moutons tous les deux mois. Il y a aussi "promouvoir le sport boules auprès de nouveaux publics", dans l'Ain. Et le meilleur pour la fin : "sensibilisation artistique à l'environnement à travers le développement d'un jardin de sons". Comprenne qui pourra. Ce n'est pas si facile d'occuper des volontaires à de véritables tâches.
Qu'on fasse de la place aux volontaires, c'est une très bonne chose. Mais faut-il pour autant aller au-delà, et y envoyer des contingents, au risque d'en faire un outil d'insertion, ce qu'il n'est pas, sans moyens budgétés de surcroît ? On a déjà des centaines de milliers de jeunes dans les emplois d'avenir, dans les administrations, les entreprises publiques, les associations. Et ce sont bien souvent des emplois temporaires, mal rémunérés et sans guère de perspective, contrairement à ce qu'indique leur nom.
On aura bientôt toute une génération dans le secteur parapublic ou associatif, en marge du marché du travail. Est-ce qu'on leur donne ainsi les meilleures armes pour leur vie professionnelle ? Est-ce qu'on n'aurait pas intérêt, à la fois pour eux et pour la société de demain, à les former plutôt qu'à les sous-utiliser ?