L'Égypte n'a effectué aucun paiement pour ces Mistral. À moins que le chèque soit arrivé dans le courrier de Noël qui n’a pas encore été trié. "Aucun virement n'a été effectué, mais c'est dans l'ordre des choses", indique le ministère de la Défense français. Désinstaller les équipements russes des navires a été long. C'est un peu comme si vous démontiez une chaufferie. La chaudière, c’est facile à enlever. Mais il y a tous les tuyaux installés partout sur les bâtiments qu'il fallait démonter. Il fallait renvoyer aux Russes un système de situation tactique, des systèmes de télécommunication. En gros, des grosses armoires métalliques qui ont été expédiées par bateau aux Russes. Ça a été fait seulement en décembre dernier. Ce n'est qu'à partir de ce moment-là que le contrat signé avec les Égyptiens pouvait être activé.
Les noms russes des deux bâtiments - le "Vladivostok" et le "Sébastopol" -, qui étaient soudés, viennent seulement d’être effacés des coques. De même, l'instruction "traduire les notices du russe à l'anglais" n'a été donnée que tardivement. Ce qui a laissé penser, à ceux qui voulaient le croire, que la France allait finalement revendre aux Russes, vu le réchauffement diplomatique entre Paris et Moscou. "On ne changera pas d'avis", nous dit-on au cabinet de Jean-Yves Le Drian.
Avant la fin de ce mois de janvier, un équipage de marins égyptien doit arriver à Saint-Nazaire pour se former à piloter ces bâtiments. En tout, il faut former 400 marins (environ 200 pour chaque bâtiment). Au printemps, le premier bâtiment doit quitter le site de Loire-Atlantique avec les Égyptiens et une trentaine de Français pour ramener le navire dans les eaux égyptiennes. Le deuxième bâtiment suivra pendant l’été.
Le gouvernement a affirmé que la revente des Mistral à l'Egypte était "une très bonne affaire", que la rupture du contrat russe était compensée. Peut-on douter de cette parole ? "L'important politiquement, c'était de trouver un client. L'Égypte n’avait pas besoin de ces Mistral, mais elle les a acceptés", affirme le chercheur Corentin Brustlein de Ifri. "La désinformation sur le coût de l'opération a été soigneusement organisée", accuse Jean-Vincent Brisset, de l'Iris.
Qu'en disent les députés membres des commissions parlementaires ? Les socialistes, disciplinés, nous ont raccroché au nez quand on leur a parlé des Mistral. Dans l’opposition, Pierre Lellouche, l'ancien ministre qui avait pourtant signé l’accord avec la Russie sur la vente des Mistral, affirme être dans le bleu total. Il demande : qui finalement va payer ces Mistral ? "Ce que je sais, c'est que les finances de l'Égypte rendent très aléatoire l'idée que ce pays peut financer l'achat de ces bateaux. Autrement dit, cet argent viendra d'Arabie Saoudite", affirme-t-il. Est-ce que c'est l'Arabie qui va faire le chèque ? Aucun commentaire au ministère de la Défense.
Aujourd'hui la France a remboursé la Russie (autour de 1 milliard d’euros). Elle a réussi à replacer ses Mistral en un temps record. Mais elle n’a