Des animaux maltraités, des abattoirs lugubres et des
scènes d'une violence extrême. L'association L214 a révélé des vidéos montrant
la maltraitance envers les animaux en France et plus précisément dans les abattoirs du Vigan et dans les Pyrénées-Atlantiques. Les images sont d'une telle
violence qu'elles ont eu un écho retentissant. À tel point que le ministre de
l'Agriculture avait ordonné des inspections dans tous les abattoirs sous un
délai d'un mois. "En cas de défaut avéré constaté à l'occasion de ces
inspections", Stéphane Le Foll demande "la suspension sans délai de
l'agrément de ces établissements".
Les vidéos des abattoirs proviennent en général des
caméras de surveillance postées au sein des établissements. Contactée par
RTL.fr, Brigitte Gothière, cofondatrice de l'association L214, explique que ces
informations peuvent être obtenues grâce à un réseau de lanceurs d'alerte.
"Cela peut aller de l'électricien qui vient de changer une ampoule dans un
abattoir et qui voit des choses inadmissibles, au vétérinaire qui y
travaille". L'objectif de l'association est de "montrer la réalité de
façon honnête, celle que l'on ne voit pas tous les jours",
explique-t-elle.
À l'image d'un agent secret, Nicolas (dont le nom a été changé), 25 ans, a été la
source de L214 pendant un an et demi. Dans un document exclusif, Francetvinfo dévoile son quotidien. L'histoire débute dans un couvoir de Bretagne en 2014.
"Quand je me suis fait embaucher là-bas, c'était pour gagner de l'argent,
ce n'était pas pour filmer", raconte-t-il. Il commence par trier des
poussins à la chaîne sur un tapis roulant : "Au début, j'allais lentement,
je n'osais pas les attraper. Mais au bout d'un quart d'heure, on est obligé de
déconnecter sinon ça ne marche pas. Après on les prend par poignées, on les
regarde vite fait et on les balance". Tout à basculer au bout d'une
semaine, lorsque Nicolas décide de dénoncer ce qu'il voyait.
Il contacte alors l'association qui "lui fournit le
matériel - une caméra cachée et une GoPro - et le jeune homme commence à filmer
pendant ses journées de travail", raconte le site. En fin de journée, il
transférait toutes les images récoltées sur un disque dur. "Après le
couvoir, j'ai eu des insomnies pendant plusieurs semaines", raconte-t-il à
Francetvinfo. La diffusion des vidéos entraînera la fermeture de l'entreprise.
Son patron sera condamné à 19.000 euros d'amendes.
"Nicolas est officiellement devenu l'"enquêteur" de L214, passant de militant bénévole à salarié de l'association". Afin de mener ses enquêtes, il fait le tri parmi les annonces de Pôle emploi. Cependant, postuler et se faire embaucher n'est pas une mince affaire. Il a dû "faire deux mois d'intérim dans l'agroalimentaire dans des trucs qui n'avaient rien à voir, les services à l'élevage, les vaccinations, uniquement pour se faire un CV et que l'agence le mette sur cet emploi", détaille-t-il.
Il était important aussi pour "l'agent secret" de rester assez longtemps au sein de l'entreprise. "J'ai travaillé dans un abattoir de moutons de la région nantaise. Mais le contrat ne durait qu'une semaine. C'était trop court pour prendre des images qui soient exploitables médiatiquement et juridiquement. Et je n'étais pas au bon poste. Il aurait fallu que je sois employé juste avant l'égorgement ou juste après", explique Nicolas.
Il confie également sa méthode : il filme "quand il est seul ou quand les autres employés ont le dos tourné. Cela ne l'empêche pas d'éprouver du 'stress' et surtout 'la peur de se faire prendre'" : "Filmer en caméra cachée implique aussi d'avoir des postures pas très naturelles, mais qui en réalité ne se voient que si on sait ce qu'on est en train de faire". Le jeune homme va observer des horreurs : "Les infections surviennent rapidement. Tous les matins, on ramassait des canes mortes dans la nuit. D'autres avaient les parties génitales qui s'infectaient et on devait leur tordre le cou".
Son infiltration n'était possible qu'en jouant un rôle "dès l'entretien d'embauche et après, avec les salariés de l'entreprise, huit heures par jour pendant des semaines. On ne peut pas parler de sa vie privée. On n'a plus de vie personnelle non plus. On part à des centaines de kilomètres de chez soi". Ces raisons ont poussé Nicolas à arrêter ce travail d'investigation à l'hiver 2015.
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