Lutte anti-tabac : le salut des cigarettiers passe par les pays pauvres

Dimanche 20 novembre en France, les buralistes ne pourront plus s’approvisionner qu’en paquet neutre. Tombés en disgrâce en Occident, les industriels vont aller recruter des fumeurs dans les pays émergents

Des cigarettes (illustration)

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Nous vous emmenons, quelques instants, dans le paradis de l'industrie du tabac. Un pays où il n’existe aucune campagne de prévention, pas d’âge minimum pour acheter des cigarettes : vous croiserez, dans les rues en Indonésie, des fumeurs âgés de 6 ans. Ou plus jeunes encore. Parfois, les garçons ont encore des couches et déjà la clope au bec. Deux-tiers des Indonésiens fument. Dans certaines cliniques, on soigne les cancers en faisant inhaler de la cigarette aux malades.

Là bas, le tabac est le deuxième poste de dépense des foyers. Juste après le riz. Il faut dire que les publicités pour la cigarette envahissent l’espace urbain. Les cigarettiers sponsorisent les concerts de rock et les rencontres sportives. La consommation de tabac ne cesse d’augmenter. L’Indonésie et ses 260 millions d’habitants représente l’un des marchés les plus prometteurs de la planète. Un paradis perdu de cigarettiers.

Les pauvres, les fumeur de demain

Les cigarettiers ont tiré la conclusion que leur avenir passait par les pays émergents. Dans les pays occidentaux, ils investissent dans le marché du vapotage. Et ils gardent espoir effectivement en regardant augmenter la consommation mondiale de tabac. En 2030, 80% des décès dû au tabac auront lieu dans les pays émergents. Demain, les fumeurs ce seront les plus pauvres.

L’Europe ne représente plus que 20% des fumeurs dans le monde. L’Asie, c'est 10%. L’Afrique, en plein boom démographique, n'en représente aujourd'hui que 3%. Vous imaginez le potentiel. Le salut des cigarettiers viendra donc de cette jeunesse qui n’a pas l’accès à la même information que nous et que les professionnels du tabac s'emploient à rendre accro, dénonce Clémence Cagnat-Lardeau, de l’Alliance contre le tabac.

Il y a encore des pays qui laissent autoriser la vente à l'unité pour séduire les plus jeunes

Clémence Cagnat-Lardeau, de l’Alliance contre le tabac

"Il y a encore certains pays qui laissent autoriser la vente à l'unité pour séduire les plus jeunes, c'est tout à fait attractif", explique-t-elle. "Il n'est donc pas du tout étonnant que les industriels investissent ces différents pays. Il est certain que les industriels ont encore certainement une bonne dizaine ou quinzaine d'années devant eux, ce qui est assez dramatique", lâche-t-elle.

"Dix ou quinze ans" avant que ces pays en voie de développement ne soient capables de résister aux cigarettiers qui, aujourd'hui, engagent des procès très coûteux pour les Etats qui votent des lois anti-tabac.

La lutte anti-tabac se coordonne à l'échelle mondiale

La mondialisation de la lutte anti-tabac a commencé, notamment avec une convention internationale qui a été signée par 180 pays (c'est historique). Ces derniers s’engagent, par exemple, à supprimer toute publicité pour la cigarette. La lutte anti-tabac est donc en train de se coordonner à l'échelle mondiale. Un chiffre : aujourd’hui 105 États (plus de la moitié des pays du monde) obligent les cigarettiers à imprimer, sur leurs paquets, des images choc.

"Aujourd'hui, les industriels gagnent du temps", dit Michèle Delaunay. "Mais la prise de conscience sera rapide, prédit la députée anti-tabac, car les pays émergents disposent déjà des informations sur la dangerosité du tabac, ce qui nous manquait il y a cinquante ans".

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