La nouvelle mobilisation contre la loi Travail, portée par la ministre du Travail Myriam El Khomri et le gouvernement, a conduit à une nouvelle série de violences et de heurts avec les forces de l'ordre samedi 9 avril. En marge des manifestations, 9 individus ont été interpellés à Paris où 3 membres des forces de police ont été blessés légèrement, a expliqué Michel Cadot, le préfet de police, qui a estimé qu'il y avait entre 300 et 400 militants ultra-radicaux qui avaient "la volonté d'en découdre".
Des violences ont également émaillé le rassemblement à Nantes où les forces de l'ordre ont été à plusieurs reprises la cible de projectiles divers, pavés, cailloux, bouteilles et oeufs, selon l'AFP. Elles ont répliqué en tirant des grenades lacrymogènes et en faisant usage de lances à eau pour empêcher l'accès à l'hypercentre. Des manifestants s'en sont pris aux vitres d'une agence bancaire, ont brisé celles d'une agence immobilière et du mobilier urbain. Des poubelles ont aussi été brûlées.
Les opposants à la loi travail voulaient maintenir la pression sur le gouvernement : salariés, étudiants et lycéens, avec l'espoir d'amplifier encore leur mobilisation malgré les vacances scolaires. Plus de 200 manifestations et rassemblements sont prévus partout en France, à l'appel de l'intersyndicale (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL, Fidl), qui s'attendait à une "mobilisation importante". Mais les chiffres sont en baisse par rapport au 31 mars, dernier rassemblement majeur au niveau national.
La contestation contre le projet de loi entre dans son deuxième mois. Depuis le 9 mars, les partisans d'un retrait du texte ont organisé cinq journées d'action, dont deux réunissant les jeunes et les travailleurs. La dernière journée unitaire, le 31 mars, avait réuni entre 390.000 et 1,2 million de manifestants à travers la France, soit près du double de celle du 9. Les cortèges ont aussi été émaillés de violences, avec notamment 177 interpellations le 5 avril, lors d'une journée à l'initiative des seules organisations de jeunesse.
En organisant cette fois la mobilisation un samedi, les syndicats espéraient "élargir le mouvement aux familles, à toutes les populations qui ne sont pas forcément en capacité de se mobiliser la semaine", indique Virginie Gensel, membre de la direction de la CGT. À Paris, les jeunes ont rendez-vous à 11h place de la Nation. Ils se joindront ensuite à leurs aînés dans un cortège qui partira à 14h de la place de la République en direction de la Nation, derrière Philippe Martinez (CGT), Jean-Claude Mailly (FO) et William Martinet (Unef) notamment.
Interpeller les élus
Eric Beynel, co-délégué général de Solidaires
En soirée, ce sont les rassemblements citoyens "Nuit Debout", prévus dans près de 60 villes françaises, qui prendront le relais. Depuis le 31 mars, le mouvement s'est réuni tous les soirs sur la place de la République, à Paris, et a essaimé en province. Il dépasse largement les seuls opposants à la loi travail: réfugiés, mal-logement, précarité, exercice de la démocratie, tout y est débattu. Pour William Martinet, la journée de samedi sera "déterminante". Reçu le 6 avril par trois ministres, dont Myriam El Khomri (Travail) qui porte le projet de loi, le leader du premier syndicat étudiant a exhorté les jeunes à "rester mobilisés".
"Le désaccord persiste", a-t-il constaté après la rencontre, tout en saluant un "cadre de dialogue qui, on l'espère, permettra de faire bouger les choses en positif". L'Unef et les autres organisations étudiantes et lycéennes, qui seront reçues lundi matin par Manuel Valls, réclament des mesures contre la précarité des jeunes. Pendant ce temps, le projet de loi poursuit, sans embûche, son parcours législatif. Les députés de la commission des Affaires sociales ont terminé l'examen du texte jeudi 7 avril, auquel ils ont apporté des modifications, notamment sur les mesures les plus polémiques : clarification des licenciements économiques, accords dits "offensifs", référendums d'entreprises...
Prochaine étape: le texte sera débattu dans l'hémicycle à partir du 3 mai. L'intersyndicale compte maintenir la pression d'ici là, avec une "nouvelle journée de grève et de manifestations" le 28 avril. "Dans l'intervalle, prévient Eric Beynel, on va continuer de mobiliser au niveau local, organiser des manifestations, et on va interpeller les élus qui seront de retour dans leurs circonscriptions pendant les vacances parlementaires."