Laurent Wauquiez, le favori pour l’élection à la présidence des Républicains, est un homme de convictions, comme il le martèle dans ses meetings ou au Grand Jury de RTL comme ce fut le cas dimanche 29 octobre. Mais j'ai des doutes sur la solidité de ses convictions. De gros doutes. Non pas sur les convictions de Laurent Wauquiez, mais sur leur permanence.
J’ai retrouvé un livre très instructif que le jeune député Laurent Wauquiez avait écrit en 2006. Dans cet ouvrage plein de générosité et d’ambition intitulé Un Huron à l’Assemblée, il se posait comme le digne héritier de Jacques Barrot, ce centriste pro-européen et humaniste qui lui avait transmis sa circonscription auvergnate. Sans imaginer un instant que puisse sortir du sillon de modération et d’ouverture celui qu’on appelait alors Laurent le Magnifique car on voyait en lui un futur prince de la renaissance démocrate chrétienne.
À l'époque, Laurent Wauquiez ne se proclamait pas de droite. Il vantait, "tout ce qui peut réunir la droite et la gauche pour construire ensemble des réformes de fond". Pour lui, il fallait "sortir des guerres de tranchée partisanes !" Ce n’est pas le son de cloche, ou plutôt de tocsin, qu’il fait entendre désormais puisqu’il ne cesse d’appeler la droite à redevenir la droite toujours plus à droite dans une posture de fermeture envers l’étranger, à l’opposé de celle qu’il adoptait autrefois !
Dans ses engagements premiers, cet élu prometteur, pour ne pas dire promenteur, se plaçait sous le patronage du pasteur du Chambon-sous-Lignon, ce village qui a sauvé tant de juifs pendant la guerre. Un homme admirable, le pasteur Trocmé, qui avait tenu ce langage, rappelle-t-il, dès 1941 aux villageois: "Dans la Bible il est écrit que si quelqu’un frappe à votre porte vous ouvrez un battant, mais s’il est persécuté, ce sont les deux battants qu’il faut ouvrir". Aujourd’hui Laurent Wauquiez ne cite plus le pasteur Trocmé, pas plus qu’il ne célèbre l’Europe comme il le fait dans des pages ardentes pour "l’aboutissement du projet européen qui reste le principal défi politique de (sa) génération". Aujourd’hui, il n’en a que pour la Nation, oubliant l’Europe !
L’homme politique a évolué au gré des vents. Ou "involué". Mais sans jamais répondre à cette question : Laurent Wauquiez qu’as tu fait de tes engagement premiers ? T’en souviens-tu seulement ? Les hommes politiques seraient bien inspirés de relire leurs livres, ou de les lire tout simplement quand ils ne les ont pas écrits. Ce n’est pas le cas pour notre huron auvergnat, qui a de la plume et qui écrit même dans ce livre de jeunesse qu’il ne voudrait pas devenir Lorenzaccio, ce héros de tragédie qui a perdu son âme dans le jeu du pouvoir. Lorenzaccio qui disait "le vice a été pour moi un vêtement, maintenant il me colle à la peau".