ÉDITO - Salman Rushdie, "un symbole de résistance aux incantations meurtrières venues de Téhéran" pour Étienne Gernelle

Salman Rushdie, visé par une fatwa iranienne depuis 1989 et violemment agressé au couteau en 2022, sort un nouveau livre ce jeudi 18 avril.

L’écrivain britannique Salman Rushdie.

Crédit : JOEL SAGET / AFP

EDITO - Salman Rushdie, le cauchemar des Mollahs

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Salman Rushdie, le cauchemar des mollahs. C'est une stupéfiante collision d’actualité : c'est au moment où l'Iran des mollahs fait parler de lui, et fait surtout parler la poudre, que revient son adversaire le plus coriace, l’homme qui lui résiste depuis 35 ans. J’ai nommé Salman Rushdie. Rushdie, qui sort aujourd’hui aux États-Unis un livre intitulé Le couteau, et qui raconte, justement, l’attentat au couteau qui lui a coûté un œil il y a 18 mois à New York. Le livre sort jeudi 18 avril en France, chez Gallimard. Or, et peu s’en souviennent, c’est avec Rushdie que l’ambition iranienne de dominer l’islamisme mondial a commencé.

Nous sommes le 14 février 1989. C’est le jour de la Saint-Valentin, mais ce n’est pas une lettre d’amour qu’écrit l’Ayatollah Khomeiny, c’est une fatwa. Une condamnation à mort qui vise Rushdie, coupable à ses yeux d’avoir blasphémé le Prophète avec son livre, Les Versets sataniques. Or, il faut se souvenir de la signification géopolitique de cette fatwa. C’est Gilles Kepel qui le raconte très bien dans ses livres. À ce moment-là, les moudjahidines afghans, soutenus par les saoudiens – sunnites – font battre en retraite l’Union soviétique. Mais cette victoire est éclipsée dans les médias par la fatwa. L’Iran prend médiatiquement la tête de l’islamisme mondial…

Cette fatwa a changé beaucoup de choses dans le sens où dès lors, l’islamisme voit le monde entier comme son terrain de jeu. Rushdie, citoyen britannique, est menacé bien loin des terres d’islam. C’est un précédent, que l’on retrouvera ensuite avec, notamment, l’attentat contre Charlie Hebdo.

Mais la fatwa n’a pas suffi à assurer la domination de Téhéran sur le djihadisme. Il faut dire que ce n’est pas évident, seulement 15 % des musulmans dans le monde sont chiites. Ces 25 dernières années, c’est plutôt le djihadisme sunnite qui a occupé le devant de la scène avec Al Qaeda et Daech. Mais ceux-là ont connu des revers, et l’Iran n’a pas abandonné son ambition, activant notamment le Hezbollah au Liban et en Syrie, les milices chiites en Irak, les Houthis au Yemen. Et, donc, le Hamas à Gaza, qui, il faut le noter, est lui sunnite.

Mais que pèse Rushdie face aux mollahs ? Militairement ? Rien ! C’est un symbole de résistance aux incantations meurtrières venues de Téhéran. Voici son 23e livre, dont 18 depuis la fatwa. Rushdie est toujours là, et il écrit encore. Puisse-t-il hanter encore longtemps des nuits des mollahs.

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