Alençon : ces dernières dentellières qui travaillent à l'aiguille et à la main
REPORTAGE - RTL s'est rendu dans l’Orne à Alençon, à la rencontre de femmes qui exercent le métier de dentellières. Et ce sont les seules en France qui fabriquent une dentelle entièrement faite à l’aiguille et à la main.

Une dentelle entièrement faite à l’aiguille et à la main, un savoir-faire unique au monde. Mais avant d’aller à leur rencontre, un peu d’histoire. Tout commence en 1650. Marthe La Perrière introduit à Alençon une technique de dentelle venue d’Italie appelée "Le Point de Venise". Elle le perfectionne. "Le point de Venise" devient "le Point de France" puis "le point d’Alençon".
Colbert, alors ministre de Louis XIV, crée une manufacture dans la ville normande. À son apogée, la fabrique emploie 10.000 ouvrières. Mais au fil des siècles, elle est victime de la concurrence de la mécanique. Alors, pour éviter la disparition d’un savoir-faire français, l’Etat a créé en 1976 l’atelier conservatoire national du Point d’Alençon.
Et c’est dans cet atelier que nous avons pu pénétrer, une structure où travaillent encore 9 dentelières dans une ambiance quasi monacale, comme Valérie Durand cheffe d’atelier : "Nous commençons par les dessins. Le dessin artistique représente notre dentelle telle qu'elle sera au final. Le dessin technique va nous servir à piquer notre parchemin".
Elles manient avec dextérité du fil de coton quasi invisible, utilisent du crin de cheval, blanc ou noir. L’exécution d’une dentelle nécessite dix étapes. Après le dessin, le piquage, les brodes, le levage, voici le luchage. "Le luchage, c'est un repassage à froid qu'on applique à l'aide d'une pince de homard", poursuit Valérie Durand.
Le temps s’écoule au rythme des doigts qui s’agitent
Camille, 36 ans, très concentrée, exerce son art avec agilité. "On doit faire bien avant de faire vite. J'écoute souvent de la musique pour faire abstraction de ce qui se passe à côté", raconte-t-elle.
Martine est quant à elle dentellière depuis 43 ans : "Comme ma vue a baissé énormément, je travaille avec un fil légèrement plus gros que l'ordinaire". Elle nous dévoile son secret de longévité : "Je commence par RTL, ça met en forme !". Elle reconnaît avoir cassé un fil à cause d’un fou rire. En face d’elle, Amandine, 23 ans. Elle a fait une première année de médecine avant d’embrasser la carrière de dentellière. Comme ses collègues, elle met entre 7 et 15 heures pour réaliser un centimètre carré.
Un savoir-faire classé à l'UNESCO
RTL salue bien sûr particulièrement Martine et toutes ces dentellières, dont le savoir-faire est inscrit, depuis dix ans maintenant, au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
Et, c’est une fierté pour Hervé Lemoine, directeur du mobilier national : "C'est vraiment une reconnaissance d'un savoir-faire, une particularité du génie humain". Et l’atelier est tourné vers l’avenir. Les dentellières participent régulièrement aux œuvres d’artistes contemporains. Le musée des Beaux-arts d’Alençon expose leurs savoir-faire qui participent à la réputation internationale de la ville.