Franchement, comment réagiriez-vous si, en plein milieu d'une discussion passionnante avec votre voisin, retentissait autour de vous La Chevauchée des Walkyries, de Wagner, et ce à un niveau de décibels "brouillant l'écoute". Ou si, vous adressant à une foule, vous entendiez brusquement une musique sirupeuse "nimber" votre discours et l'empêcher d'être audible. Enfin, que diriez-vous si, durant une scène de ménage avec votre "moitié" (ou votre double), vos voix étaient brusquement couvertes par un tube de Queen (quoique, là, au moins, on vous entendrait justement moins "couiner") ?
Dans les trois cas, avouez que le résultat serait au mieux décalé et déplacé, au pire inconcevable, inimaginable, insupportable, bref, inacceptable. La musique adoucit certes les mœurs, mais il y a plus de contre-exemples que de contre-ut. Pourquoi, dès lors, ce qui nous semble évident dans la vraie vie ne nous choque-t-il pas à l'écran ? Du moins, pas autant que cela devrait. Car, enfin aucun reportage, aucune fiction, aucun documentaire n'échappe actuellement au rajout d'un fond mélodique envahissant, obsédant, exaspérant.
Que ne s'est-on moqué des films de la grande époque hollywoodienne qui prenait souvent de "grands airs", mais c'était à des moments très "encadrés", "étudiés", quand il fallait souligner une action, par exemple pour accompagner la grande déclaration de Rhett Butler à Scarlett avec Atlanta en feu à l'arrière-plan. Ou pour accentuer, autre cas (et grand éclat de rire), la douleur de Ben Hur, apprenant que sa sœur et sa mère sont devenues lépreuses.
Oui, à l'époque, les cinéastes y allaient peut-être fort côté "clef de sol", mais c'était pour appuyer une action ou une réaction, les autres scènes faisant la part belle aux dialogues et aux images. Rien à voir avec l'actuel caviardage musical, justement pas toujours musical ! Redisons-le, quand la musique ponctue, c'est bien, quand elle pollue, c'est rien. Exemple type dimanche 8 mai avec Après Hitler, le remarquable film de France 2 diffusé à 20h55. Ne loupez surtout pas ces 91 minutes hallucinantes sur la période qui suit le 8 mai 45 et qui montre une Europe anéantie, sale et salie, une Europe en gravats, une Europe de flux migratoires dans laquelle 11 millions de prisonniers de guerre croisent sur les routes d'autres millions de soldats décidés à rentrer chez eux.
Le tout sur fond de vengeances, de meurtres, d'images criantes de vérité. Si on ose parler de vérité à cette époque, où les pendaisons sans jugement succèdent aux viols, où les actions d'horreur commises par les néojusticiers autoproclamés, alternent avec les réactions terribles des victimes brièvement devenues bourreaux quand, autorisées à se venger, elles se laissent aller à faire ce qu'on leur a fait.
Après Hitler est également spectaculaires par ses terribles images inédites, jamais complaisantes, notamment sur la "Chienne de Buchenwald" qui collectionnait les réductions de têtes des victimes juives, et les cendriers fabriqués avec leur peau. Oui, vraiment, indispensable "doc"...hélas trop souvent "pollué" par une musique omniprésente s'ajoutant aux bruits naturels des scènes, et à la narration déjà "sourde" de Vincent Lindon. C'était "tout sauf nécessaire". Ce film aussi bouleversant que nécessaire se suffit à lui-même, et se passait donc "de grands airs".
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