Pourquoi Ivan IV, premier tsar de Russie était-il surnommé "le Terrible" ?

Direction la Russie. Ivan le Terrible est le premier tsar de l'histoire du pays. Au milieu du XVIe siècle, celui qui est au départ grand prince de Moscou devient tsar à l'âge de 17 ans. En peu de temps, Ivan IV Vassilievitch, intelligent et dynamique, sort la Russie du Moyen-Âge et la modernise. Guerrier redoutable, il va fonder un empire puissant. Mais plus les années vont passer, plus Ivan va devenir dangereux et va plonger la Russie dans le chaos.

Rattrapé par le traumatisme d'une enfance solitaire au milieu de comploteurs et jamais consolé de la mort de sa première épouse, Ivan va devenir parano au stade le plus extrême, méfiant, mégalo, pervers. Ivan déteste tout le monde et commet un nombre incalculable de crimes abominables, faisant preuve à chaque fois d'une incroyable imagination pour innover dans la façon de tuer les gens. Ivan va même jusqu'à assassiner son propre fils. 

À quelques kilomètres de Moscou, à Kolomenskoïe, Ivan voit le jour en 1530. À la mort de son père, il a 3 ans et devient grand prince de Moscou, l'un des états russes les plus puissants. Mais comme il est trop petit pour gouverner, c'est sa mère, Elena, qui assure la régence. Ivan est un petit garçon curieux, vif et joyeux. À l'âge de 8 ans, il se retrouve orphelin après le décès de sa mère, probablement empoisonné. Et c'est sa nourrice qui s'occupe de lui. Mais un jour, elle est enlevée sous les yeux du petit garçon. Pour lui, c'est le premier d'une longue série de traumatisme. 

Un tsar réformateur

Lorsqu'Ivan a 17 ans, l'âge de la majorité à cette époque, il se fait couronner tsar de toutes les Russies, dans la cathédrale de Moscou. Il est à la tête de la principauté de Moscou qu'il gouverne déjà avec une mosaïque de petits états autour. Il est également reconnu chef de l'église orthodoxe russe. Et dans la foulée, Ivan se marie avec une très belle jeune femme de 17 ans également, Anastasia Romanovna, fille de l'un des hommes les plus riches de la Russie. 

Calme, sensible et pieuse, la tsarine apaise le jeune Ivan et elle lui donne deux enfants, une fille et un garçon. Ivan a donc un héritier et il est fou de joie. Même si le tsar est impulsif, il semble être un homme heureux et cela se voit dans son début de règne. Ivan IV réforme la justice, l'armée, l'administration, mais aussi la fiscalité de la Russie du XVIe siècle, les finances et l'église. Il limite le pouvoir des nobles, et des gouverneurs de province au profit d'une nouvelle élite russe issue de la petite noblesse. 

Avec lui, Moscou se transforme et connaît un sérieux lifting. Sur la place rouge, Ivan IV fait sortir de terre la fameuse basilique Basile le Bienheureux avec ses coupoles de toutes les couleurs en forme de bulbe. Mais Ivan IV n'est pas qu'un réformateur, c'est aussi un conquérant. Grâce à une armée réorganisée, il agrandit son territoire avec des victoires militaires contre les peuples qui défient son autorité. Il explore aussi la Sibérie qui est à la Russie ce que l'Amérique est pour les Européens, un nouveau monde plein de promesses.

La police secrète du tsar

En 1560, Ivan perd son épouse, à seulement 30 ans. Pour le tsar, c'est un choc. À partir de là, son sadisme et son agressivité vont prendre le dessus. Il voit des ennemis partout, il ne fait confiance à personne. Depuis son enfance, il vit dans la hantise d'un complot. Il est convaincu que ce sont les Boyards, qui ont empoisonné sa mère, son premier fils et son épouse. Il se déchaîne contre eux. Les plus chanceux vont être exilés au fin fond de la Russie, dans des zones inhospitalières ou sont enfermés dans des monastères. Mais d'autres sont pourchassés par la police secrète du tsar. Une armée de cavaliers tout de noir vêtus avec comme un signe un balai et une tête de chien. Les Boyards sont attrapés, décapités à la hache ou empalés. 

Certains sont relâchés dans la forêt en plein hiver, chassés par des loups. D'autres doivent courir et plonger dans des rivières jusqu'à ce qu'ils se noient. Leurs terres sont confisquées et redistribuées à des paysans ou à la petite noblesse. En vérité, c'est toute la Russie qui est concernée par le déferlement de violence d'Ivan le Terrible. Ivan et ses escadrons torturent, massacrent en toute impunité. Un bilan de plus de 10.000 personnes tuées en seulement 7 ans. D'autres croupissent dans des cachots aménagés par Ivan. Dans ces geôles lugubres, les bourreaux s'en donnent à cœur joie. Ils utilisent le fouet, le pal, des aiguilles, des tenailles, des charbons ardents et des cordes pour sectionner les corps par frottement. Le tsar lui-même participe à ces actes de torture. Il les justifie comme une mission divine.

Plus la violence monte crescendo, plus la Russie s'enfonce dans la crise

Marié huit fois, il fait noyer une de ses femmes le lendemain du mariage, car elle n'est pas vierge. Une autre est accusée de complot et envoyée dans un monastère et sa famille est exécutée. Une autre, infidèle, doit regarder son amant se faire empaler, puis finit ses jours dans un couvent. La mégalomanie d'Ivan et son délire de persécution ont un impact sur sa façon de gouverner. Beaucoup pensent qu'il n'est plus l'homme de la situation. Plus la violence monte crescendo, plus la Russie s'enfonce dans la crise. 

Après 37 ans d'un règne marqué du sceau de la terreur, Ivan le Terrible meurt en 1584 lors d'une partie d'échecs, à l'âge de 53 ans. Il est inhumé dans la crypte de la cathédrale de l'archange Saint-Michel à Moscou, aux côtés de son fils qu'il a assassiné trois ans plus tôt. Aujourd'hui encore, la cause de son décès demeure inconnue, même si des analyses ont montré la présence de grosses doses de mercure sur ses os. Alors, Ivan IV le Terrible est-il mort empoisonné comme il le redoutait tant ? Pas sûr, car à l'époque, on prenait souvent du mercure, notamment comme remède à des fins médicales. 

Pendant des décennies, peut-être des siècles, la simple évocation du nom d'Ivan IV le Terrible fichait la chair de poule à n'importe qui. Il n'y a qu'à l'époque soviétique qu'Ivan le Terrible va finalement être réhabilité grâce à un film. Un biopic réalisé en 1945 par le cinéaste Sergueï Eisenstein, le favori de Joseph Staline. 

>> Les Salauds de l'Histoire. À travers un récit long format, Éric Brunet retrace, toutes les semaines, la vie et les crimes d'un salaud de l'Histoire. Une collection spéciale de notre émission phare Entrez dans l'Histoire.

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