Philippe Claudel sort son nouveau roman, Inhumaines, chez Stock. Un livre surprenant, déstabilisant, à la fois drôle et glaçant. L'auteur part de notre monde tel qu'il tourne, plutôt mal que bien, de situations réelles, donc, et il pousse le curseur pour en faire 25 histoires outrancières, absurdes, grotesques et pourtant si plausibles. "C'est un livre inconvenant, politiquement incorrect parce que j'en ai assez de ces langues sirupeuses et anesthésiantes qui ne cessent de nous paralyser. Je crois qu'il faut parfois dire les choses", explique l'écrivain.
Pour illustrer la société à deux vitesses dans son roman, Philippe Claudel imagine des parcs à pauvres où les plus aisés viennent en excursion les observer comme des animaux avec interdiction de leur jeter de la nourriture. Le mariage pour tous, poussé lui aussi à l'extrême, donne lieu au récit cocasse d'une noce entre un homme et une ourse. Le rire se fait plus grinçant, quand un galeriste transforme en œuvres d'art vendues une fortune les cadavres congelés des SDF morts dans la rue. "Là aussi, c'est exagéré, mais on en est au point à considérer ces pauvres gens dans la rue, comme des mobiliers urbains. Il y a une sorte d'accoutumance à l'horreur", explique Philippe Claudel.
Le rire côtoie souvent le malaise dans le livre de Philippe Claudel pour que le lecteur prenne bien conscience que notre humanité file un mauvais coton. Le sexe, omniprésent, y est réduit à un bien de consommation, un grand marché où un homme met en vente sa femme sur internet, où un autre offre 3 esclaves sexuels à son épouse pour Noël. Le sexe, nouvel opium du peuple. "On pourrait dire que le sexe occupe tellement de places dans nos vies, qu'il devient un moyen pour s'empêcher de réfléchir et de penser. C'est un sexe sans amour dans le livre, on est plus dans une sorte d'expérimentation des peaux et des corps", poursuit Philippe Claudel.
"Je suis sans limites car, justement, je pense que ce monde nous en impose trop.
Philippe Claudel
Jouant des provocations potaches de Hara-Kiri et des anticipations cauchemardesques de George Orwell, Philippe Claudel ne s'interdit rien dans Inhumaines. "Je suis sans limites car, justement, je pense que ce monde nous en impose trop. J'ai l'impression qu'on ne peut plus rire de tout. La preuve, certains humoristes doivent ensuite s'excuser après certains sketchs. Je ne me suis pas du tout censuré", conclut-il.
Philippe Claudel en totale liberté nous met en garde contre les monstres que nous sommes en train de devenir. Un sommet d'humour noir... Ça passe ou ça casse, mais ça ne laisse pas indifférent. Inhumaines est publié chez Stock.
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