Faut-il limiter l’accès des réseaux sociaux aux moins de 15 ans ? L'Assemblée nationale a décidé que oui. Ce jeudi 2 mars, les députés ont débattu et voté une proposition de loi du parti Horizons visant à instaurer une majorité numérique fixée à 15 ans pour mieux réguler l'accès des mineurs aux plateformes sociales. Elle a été adoptée à une quasi-unanimité (82 voix contre 2) en première lecture et doit désormais arriver au Sénat.
Avec ce texte, Tiktok, Instagram et les autres géants du numérique ne pourront plus accepter l'inscription d'un mineur de moins de 15 ans, sauf autorisation expresse de la personne qui détient l'autorité parentale. En clair, collégiens et collégiennes ne pourront plus s'inscrire sur un réseau social sans en parler avant à leurs parents et sans que ceux-ci donnent leur accord.
Ce concept de majorité numérique n'existait pas encore dans la loi française. Les députés ont opté pour l'âge de 15 ans pour s'aligner sur le seuil déjà prévu par la loi Informatique et libertés de 2018 en matière de consentement aux traitements de données à caractère personnel. Un critère qui correspond aussi à l'âge où les jeunes entrent au lycée et à l'âge de la majorité sexuelle.
Ce texte entend insuffler un changement de paradigme à l'heure où il est très facile pour les adolescents de mentir sur leur date de naissance pour passer outre la barrière de l'âge légal. L'an passé, 87% des 11-12 ans déclaraient utiliser au moins un réseau social, selon une enquête de l'association Génération numérique, alors que la plupart des plateformes ont pourtant fixé un âge limite de 13 ans dans leurs conditions d'utilisation. Le texte adopté par l'Assemblée donne aussi la possibilité aux parents de demander la suspension du compte d'un enfant de moins de 15 ans.
À noter qu'en cas de manquement, une amende pourra être infligée aux entreprises fautives. Le montant de ces contraventions pourrait aller jusqu'à 1 % du chiffre d'affaires mondial du groupe concerné.
L'instauration d'une majorité numérique à 15 ans soulève évidemment la problématique de la vérification de l'âge des utilisateurs. Le projet de loi se garde bien de trancher cette question et confie au Conseil d'État la responsabilité de définir les modalités de ce contrôle. Un sujet épineux, faute de solution technique satisfaisante sous tous rapports, qui n'a toujours pas fait l'objet d'un consensus jusqu'ici, et qui fait par exemple s'éterniser le dossier du blocage de l'accès des sites porno aux mineurs depuis plusieurs mois.
Le salut pourrait toutefois venir d'un système de vérification en "double anonymat" consistant à passer par un intermédiaire de confiance pour attester de l'âge de l'internaute avec fiabilité tout en évitant de confier la gestion des attestations de majorité aux plateformes finales. Une solution de ce type doit être testée par le gouvernement avant la fin du mois.