La prise de contrôle de Twitter par Elon Musk a donné un coup de projecteur au réseau social Mastodon, présenté comme une alternative libre à la plateforme à l'oiseau bleu. Inquiets des réformes préparées par le milliardaire controversé ou simplement curieux de considérer de nouvelles plateformes, de nombreux utilisateurs se sont aventurés sur ce site de micro-blogging open-source et décentralisé fondé en 2016.
Selon son créateur, le développeur allemand Eugen Rochko, près de 500.000 personnes avaient rejoint la plateforme depuis la fin du mois d'octobre, portant à plus de 1 million le nombre de "mastonautes" actifs ce dernier mois. Une broutille comparé aux 240 millions d'utilisateurs actifs de Twitter. Mais Mastodon enregistre aujourd'hui des milliers d'inscriptions chaque heure.
Accessible depuis une application mobile ou son site Internet, Mastodon offre à bien des égards une expérience comparable à celle de Twitter avec la possibilité de partager des "pouets", des images et des vidéos dans une limite de 500 caractères et des fonctionnalités bien connues comme les hashtags, la mise en signet de favoris et le boosting, sorte de retweet local. Le réseau est garanti sans publicité, financé par des donations et des sponsors, et surtout décentralisé.
Contrairement à Twitter, où tous les utilisateurs passent par la même infrastructure centrale, il faut s'inscrire sur une instance, un serveur décentralisé. Il en existe plus de 4.000, organisés autour de centres d'intérêts et de région géographiques et gérés par des bénévoles ou des organisations indépendantes.
Ces instances sont régies par leur propre règlement intérieur et suivent leur propre politique de modération qui peuvent varier d'un serveur à l'autre. Elles communiquent entre elles, de sorte qu'il est possible d'échanger avec des utilisateurs issus d'autres serveurs.
Autre grande différence avec Twitter, Mastodon n'utilise pas d'algorithmes de recommandation qui contrôlent les publications qui apparaissent sur votre écran en mettant principalement en avant des contenus qui correspondent à vos goûts et vos opinions et vous enferment dans vos certitudes sans vous ouvrir à la contradiction.
Alors que Twitter utilise ce système par défaut pour hiérarchiser les tweets dans le fil d'actualité de ses utilisateurs, Mastodon se contente d'afficher les publications des comptes auxquels l'utilisateur est abonné au fur et à mesure de leur mise en ligne. Il est aussi possible de consulter un fil local, qui propose les publications des autres utilisateurs de son instance et un fil global, affichant en plus les posts des instances voisines.
La première expérience sur Mastodon a tôt fait de dérouter les adeptes de Twitter. Il convient donc d'abord de choisir une instance sur laquelle s'inscrire. Attention, ayez à l'esprit que l'administrateur de votre instance aura connaissance de votre mot de passe (comme Twitter, cela dit). Privilégiez donc une combinaison de caractères inédite.
Mastodon propose différents serveurs regroupés selon leur thématique ou leur situation géographique. L'instance la plus connue est mastodon.social, qui compte plus de 150.000 membres actifs mais n'acceptait plus les nouvelles inscriptions ces derniers jours.
En France, on trouve plusieurs serveurs, dont celui de l'association de défense des libertés numériques La Quadrature du Net, Mamot - qui n'accepte cependant plus de nouveaux inscrits -, Framapiaf, hébergé par le développeurs de logiciels libres Framasoft - complet également - ou Piaille, lancé par un hébergeur de sites Web où l'on retrouve notamment l'ancienne ministre Cécile Duflot et de nombreux journalistes. Il existe aussi des instances spécialisées, notamment dans les communautés scientifiques.
Une fois inscrit, il n'est pas possible de lier son carnet d'adresse pour se voir suggérer des contacts comme sur Twitter. Mais vous pouvez rechercher des utilisateurs dans la barre de recherche en haut à gauche de l'interface. Il existe aussi des services qui vous proposent de lier votre compte Twitter pour retrouver les profils de vos abonnés et abonnement sur Mastodon. Par exemple, le service Twitodon, recommandé par Framasoft.
N'espérez pas trouver sur Mastodon une alternative parfaite à Twitter. L'expérience utilisateur est plus fastidieuse que sur le réseau social à l'oiseau bleu. L'absence d'algorithmes de recommandations, malgré leurs effets pervers, se fait vite sentir et l'on peut vite être lassé de voir s'afficher des publications qui ne sont pas forcément de son goût.
Twitter a surtout pour lui l'effet de réseau : c'est la plateforme où les choses se passent, où l'on peut suivre l'actualité au fil des hashtags et des publications. Sur Mastodon, les fils d'actualité "globaux" des instances peuvent aussi devenir rapidement illisibles sans filtre de langue et sous la multiplication des messages. Le réseau social n'est pas épargné non plus par les problèmes de modération, propres à chaque instance, ni la désinformation. En l'état, Mastodon constitue donc plutôt une alternative complémentaire à Twitter, pour les utilisateurs désireux d'échanger avec leurs pairs autour de thématiques spécialisées.