Pour tous les patients touchés par le Covid-19 sortis des services de réanimation, se profile ensuite un long chemin, celui de la rééducation. Jamais les hôpitaux français n’ont soigné autant de patients en réanimation, plus de 7.000 depuis le début de la crise sanitaire.
À l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, les patients ayant subi les traitements les plus lourds sont pris en charge dans le service de rééducation post-réanimation. Ce service, dans un long couloir aux chambres toutes occupées, accueille ceux ayant survécu au Covid-19. Assise sur un lit, Marie-Suzanne, 81 ans, se réveille péniblement. Les traits de son visage sont creusés par la fatigue. Elle a rendez-vous avec Clément, l’un des kinés du service.
Dans sa blouse médicale, les pas de la vieilles dame sont hésitants. Sa bouteille d’oxygène derrière elle, Marie-Suzanne s’avance vers le couloir, pour monter sur un tapis de marche. "Essayez de faire des grands pas", lui préconise le kinésithérapeute. "On entraîne l'endurance, pour faire un peu travailler le coeur et les artères", précise Clément.
Avant d’être ici, il a quelques semaines, Marie-Suzanne était encore en soins intensifs dans un hôpital parisien. "Quand on s'est vu il y a deux semaines elle ne pouvait faire que 3-4 pas, aujourd'hui elle peut marcher 5-6 minutes" se réjouit Clément. Mais pour Marie-Suzanne, ces quelques minutes de marches sont déjà très fatigantes : "C'est difficile, ça n'a l'air de rien" explique l'octogénaire, "je sens mon coeur qui tape puis je suis fatiguée, fatiguée, épuisée".
Chaque exercice, chaque déplacement, est une épreuve. La patiente sait que le chemin vers la guérison est encore long. Malgré la fatigue et les douleurs, l’octogénaire s’accroche. Elle aimerait bientôt revoir sa fille et si son état le permet, retrouver, à nouveau son appartement parisien. "Je suis très réaliste, je sais que tout ce que faisais avant, je ne pourrais plus le faire", témoigne la vieille dame.
Pour ces malades, comme Marie-Suzanne, tout ce qui allait de soi avant l’hospitalisation a disparu. Il faut réapprendre chaque geste du quotidien : respirer sans assistance mécanique, se tenir assis, debout, manger. L’intubation, les semaines de coma et les médicaments à haute dose ont fortement diminué les malades. À la Pitié-Salpêtrière, le docteur Jésus Gonzales dirige l’unité de réhabilitation respiratoire.
"L’intensité de la fonte musculaire, on est sur des pertes de poids de 10,15,20 kilos, l'intensité de la nutrition, ils ont des manques de protéines dans le sang qui sont majeurs, (...) Ce sont quand même des pneumopathies sévères qui peuvent donner des séquelles, des types de fibroses et des patients peuvent avoir besoin d'oxygène sur le long court", détaille le médecin. Il précise néanmoins que les particularités liées au coronavirus sont difficiles à déterminer. "On a quand même une grande majorité des malades qui après plusieurs semaines, récupèrent", explique le Dr Jésus Gonzales.
Pour faire face à l’afflux de patients, le service a doublé ses capacités et ses effectifs, en ouvrant une dizaine de lits supplémentaires.
Au-delà des séquelles physiques, il y a aussi les blessures psychologiques. Beaucoup de malades restent traumatisés par ce qu’ils ont vécu lorsqu’ils étaient plongés dans le coma. Certains se sont vus mourir, d’autres ont eu des hallucinations. Ils sont suivis par des psychologues. Couché dans son lit, Alain, 66 a perdu une dizaine de kilos. Intubé, il a passé deux semaines en réanimation.
"Quand je me suis réveillé j'ai ouvert un oeil, je pensais que j'étais au Maroc, qu'on m'avait soigné au Maroc, dans un grand centre. Je voyais des serpents devant moi, je voyais la femme de ménège et lui disais : 'Poussez-le avec votre balais'. Il ne bougeait pas, et au fur et à mesure des jours j'étais obnubilé par ça. À chaque fois que je me réveillais je voyais un truc devant moi comme ça, puis après c’est parti", raconte Alain.
Ce sportif, habitué à la course à pied, a été terrassé par le virus un matin d’avril, chez lui. Il n’en revient pas d’être encore là. Son expérience face à la mort a changé sa vie. "Quand je suis sorti de réa, j'ai failli pleurer parce que j'étais sur un déambulateur, on m'a fait sortir du lit et j'arrivais pas à marcher. Je pensais à tout, si je m'en vais qu'est-ce ce que va devenir ma fille ? Ma compagne qu'est-ce qu'elle va faire ? Je me suis battu, je pense que ce n'était pas le moment pour moi de rendre l'âme", témoigne le sexagénaire.
Cette semaine, ce père de famille devrait pouvoir rentrer chez lui, suivi à domicile par une infirmière et un kinésithérapeute. À peine libérée, sa chambre sera alors immédiatement occupée par un nouveau rescapé du Covid-19.
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