L'imam Abdelfattah Rahhaoui comparaît devant le tribunal correctionnel de Toulouse (Haute-Garonne). Les juges se penchent sur la nature de son école coranique située dans le quartier Bellefontaine. Deux thèses s'affrontent. Pour le directeur de 43 ans, son établissement dispense un soutien scolaire "pour sortir les enfants des quartiers". L'accusation, elle, y voit un collège "clandestin". "Les écoles musulmanes sont devenues la cible", se défend le directeur de l'école Al-Badr ouverte en 2013. Et de poursuivre : "Les enfants ne veulent pas du système public. Ce qui se passe en France Mme la juge, avec Daech et tout, l'école publique ne le réglera pas".
L'établissement hors contrat est autorisé à enseigner pour 55 élèves d'âge primaire, mais, selon l'accusation, des enseignements secondaires y sont également dispensés. L'Inspection d'académie a jugé le contenu des programmes du primaire "non-conforme" à ceux de l'Éducation nationale. "L'enseignement obligatoire du fait religieux en Europe que vous dispensez, c'est l'islam, seulement", argue la présidente du tribunal. Des faits que le directeur conteste farouchement. Autre sujet qui fâche : les cours de tir qu'il aurait prodigués à ses élèves. "C'étaient des cours de tir au laser, lors d'une sortie de classe", rectifie-t-il.
Vous cherchez l'excellence mais en dehors de la loi
Procureur
"Sur le site de votre école, vous proposez des classes de collège", poursuit la présidente, rappelant qu'Abdelfattah Rahhaoui a déjà été condamné en appel à Toulouse en 2010 pour ouverture illégale d'un établissement de 2005 à 2008, également à Toulouse. "C'était du soutien et de l'accompagnement", argue le responsable. "Et il y a combien d'heures de soutien ?", demande encore la présidente. "Jusqu'à 15h par semaine", répond le prévenu. "Ça fait beaucoup", ironise la magistrate, avant de se saisir d'une lettre d'une enfant de 6e.
Dans cette missive, la jeune collégienne se plaint d'avoir été giflée par le directeur en 2014 après lui avoir demandé pourquoi il fallait que les collégiens fuient les inspecteurs de l'Académie lors de leurs visites de contrôle. "Un tissu de mensonges", balaie le prévenu, à l'image de cette autre lettre rédigée par un élève de 11 ans qui affirme que le directeur a "jeté une table sur lui", toujours en 2014.
"Les écoles sont le premier barrage pour tous ces jeunes qui partent en Syrie ou autres", tente de plaider l'imam. "On cherche à donner aux enfants la meilleure éducation possible". "Vous cherchez l'excellence mais en dehors de la loi", répond le procureur, raillant un soi-disant "complot islamophobe". "Il y a trois écoles musulmanes à Toulouse. Seule Al-Badr fonctionne hors-la-loi", ajoute-t-elle, en requérant la fermeture de l'école ainsi que quatre mois de prison avec sursis. Le jugement a été mis en délibéré au 15 décembre.