“Il n’y a pas de mobile à ce jour” : l’avocate de Soraya Maurice, condamnée pour le meurtre d’une collègue travailleuse du sexe, revient sur ce crime “sans raison apparente”

"C'est une des grandes inconnues de ce dossier." En 2023, Maître Chloé Redon est appelée pour assister en garde à vue Soraya Maurice, travailleuse du sexe transgenre. La jeune femme est accusée d'avoir tué une de ses collègues, Angie Kompressor, un an auparavant. Elle, ne se souvient de rien : ni des faits, ni des raisons qui l'ont poussée à commettre ce crime.

"Dès qu'on lui rappelle les éléments de la soirée plus en détail, elle va avoir des flashs de cette soirée, même si ce sera toujours un déroulé haché dans sa tête, confie Me Chloé Redon dans Les Voix du crime. En revanche, sur le moment, elle n'a pas eu conscience de l'avoir tuée." Soraya Maurice a ensuite été recherchée pendant un mois. Elle sera mise en examen pour meurtre et placée en détention provisoire.

"Ça a mis du temps pour elle d'assumer d'avoir commis un geste aussi grave, poursuit son avocate. En revanche, elle a toujours été désolée, absolument désolée, profondément, et en plus d'avoir fait ça à quelqu'un aussi fragile qu'elle." Car les deux victimes partageaient non seulement la même activité, mais aussi la même vulnérabilité : celle d'être deux femmes transgenres.

Il n'y a pas en tout cas de mobile à ce jour

Maître Chloé Redon

Soraya Maurice a eu une enfance "tragique" en Martinique, selon Chloé Redon, avec des parents trafiquants et consommateurs de drogue. Elle se fait entretenir un temps par un homme plus âgé qu'elle en échange de faveurs sexuelles, puis est amenée en Hexagone. "En métropole, elle n'a quasiment aucune attache, décrit-elle. Elle n'a pas d'argent, elle est obligée de se prostituer. Elle sombre évidemment depuis des années elle-même dans le stupéfiant, d'abord la cocaïne, puis le crack. Elle est sous médicaments, complètement dépressive. Une vie extrêmement difficile." 

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Un des experts psychiatre qui examine Soraya Maurice conclut à une altération du discernement, contre l'avis d'un second. Pendant deux ans d'instruction, aucun mobile ne sera clairement identifié. Aucune "raison apparente", selon Chloé Redon. Le procès, ouvert en septembre 2025, ne permettra pas non plus d'en savoir plus. 

"Ont été évoquées une guerre de territoire ou peut-être même une histoire de stupéfiants", explique l'avocate. "Finalement, la Cour a reconnu qu'on ne savait pas, mais que c'était très probablement un motif futile. Ce qui a rendu très disproportionnée la réaction de Soraya Maurice pour la Cour. Mais on ne sait pas, et il n'y a pas en tout cas de mobile à ce jour." Soraya Maurice a été condamnée à 15 ans de réclusion criminelle : l'altération de son discernement ayant été tout de même retenue par la cour.

Ce dossier aura été l'occasion pour elle d'en apprendre davantage sur "l'intention homicide". "Qu'est-ce qu'on aurait pu faire ? Qu'est-ce qu'on aurait pu dire ? Est-ce que finalement, c'est Soraya Maurice qui n'a pas convaincu ? Est-ce que c'est les avocats ?" s'interroge l'avocate. Pour elle, ce dossier aurait pu être jugé sous la qualification de "coups mortels" et non de "meurtre".

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