Tir de flash-ball à Marseille : 3 questions pour comprendre la polémique
ÉCLAIRAGE - Au lendemain du procès d'un policier pour un tir de Flash-Ball mortel à Marseille (Bouches-du-Rhône), l'utilisation de cette arme aussi puissante qu'imprécise suscite la controverse.

18 mois de prison ont été requis vendredi 27 janvier à Marseille (Bouches-du-Rhône) contre un policier pour un tir de Flash-Ball mortel. Un procès de plus autour de cette arme puissante mais imprécise qui crée la polémique. Selon nos informations, depuis que les forces de l'ordre en sont largement dotées, le Flash-Ball ou son petit frère nouvelle génération, le LBD 40, ont grièvement blessé plus d'une quarantaine de personnes et principalement au visage.
Patrice Gabart, correspond de RTL dans l'Ouest, a pu rencontrer Jean-François Martin, étudiant en géographie âgé de 20 ans qui a perdu l’usage de son œil gauche lors d’une manifestation à Rennes (Ille-et-Vilaine) contre la loi Travail en avril 2016. "Je me souviens de tout, je n'ai perdu conscience à aucun moment vu comment je pissais le sang. Je ne voyais plus de l'oeil gauche, j'ai compris que c'était très grave", se souvient-il. Il y a eu 23 cas d’œils crevés selon le décompte très minutieux de L'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture. Des blessés et donc un mort à Marseille où, à l'époque, le gardien de la paix a tiré à seulement 4 mètres 40 de distance.
1. Quelles sont les règles d'utilisation du Flash-Ball ?
S'il y a un cadre légal très strict autour de ces armes, les consignes d’usage, elles, sont bien plus floues. Avant, il était interdit de tirer à moins de 7 mètres au Flash-Ball mais cela a disparu dans les toutes dernières instructions du ministère de l’Intérieur qui datent de 2014.
Désormais, plus de distance minimum mais une distance optimale, à savoir là où le tir sera le plus efficace. On ne dit plus non plus : "Ne tirez pas sur le cœur ou sur les parties génitales". Les zones de tirs ont en effet été étendues. Le texte rappelle seulement que "la tête n’est pas visée".
2. Les policiers sont-ils formés à l'utiliser ?
Si ces consignes sont rappelées aux policiers, la formation au Flash-Ball est, elle, express : 6 heures et 5 cartouches tirées sur des cibles statiques suffisent à obtenir l’habilitation. Ensuite, les policiers doivent suivre des entraînements tous les deux ans.
Ces règles sont insuffisantes selon les syndicats policiers. D’autant que comme chaque cartouche coûte chère, environ huit euros, ces remises à niveau sont donc parfois annulées pour des raisons budgétaires. De surcroît, les consignes et les entraînements, c’est une chose. Mais cela ne changera jamais le fait que le Flash-Ball reste très imprécis. Benoit Narbey est bien placé pour s'en rendre compte. C'est lui qui dirige, auprès du Défenseur des droits, la section qui enquête sur ces blessés au Flash-Ball. "Il y a un écart de trente centimètres entre le point visé et le point atteint à la distance optimale de tir qui est de 7 mètres, c'est énorme. Si vous visez le torse, vous pouvez toucher la tête ou les parties génitales", explique-t-il.
3. Le Flash-Ball va-t-il être interdit ?
Face aux dangers que représente l'utilisation du Flash-Ball, la police des polices va plus loin et atteste que cette arme est "obsolète" et qu'il faut l’abandonner au plus vite. Le gouvernement ne veut pas donner d’échéance mais dans tous les commissariats, les Flash-Ball sont en train d'être remplacés par des lanceurs de balles, équipés d'un viseur donc plus précis. Toutefois, le Flash-Ball se banalise de plus en plus dans les polices municipales avec des dizaines de commandes depuis les attentats de Paris.
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