La ligne est claire. "Nous devons être intraitables devant l'apologie du terrorisme et ceux qui s'y livrent". François Hollande l'a rappelé pendant son discours à la cérémonie d'hommage aux trois policiers tués sous les balles des terroristes : la France ne laissera pas passer entre les mailles du filet les personnes qui pourraient encourager ou glorifier les jihadistes après l'épisode sanglant des frères Kouachi et d'Amédy Coulibaly.
À commencer par Dieudonné. "Sachez que ce soir, en ce qui me concerne, je me sens Charlie Coulibaly", a écrit le polémiste dimanche au sortir de la marche républicaine à Paris. La phrase, allusion au nom du jihadiste auteur de la fusillade à Montrouge et de la prise d'otages de la porte de Vincennes, a depuis été effacée.
Mais elle lui a valu lundi l'ouverture d'une enquête par le parquet de Paris. Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a dénoncé des propos "abjects (...) qui témoignent d'une irresponsabilité, d'un irrespect et d'une propension à attiser la haine et la division tout simplement insupportables".
Signe de la fermeté des autorités, un homme de 27 ans a été condamné lundi par le tribunal correctionnel de Toulon à un an de prison, dont trois mois ferme pour apologie d'un acte terroriste. Cet habitant de La-Valette-du-Var avait publié sur son site Facebook des photos de jihadistes et des propos faisant l'apologie des attaques sanglantes de la semaine dernière.
Mis en cause dans une affaire similaire, un internaute strasbourgeois restera en prison jusqu'à son procès fin janvier. Âgé de 30 ans, il est soupçonné d'avoir relayé des messages se félicitant de l'attentat des frères Kouachi sur un compte Facebook anonyme. Il avait publié une photo montrant une kalachnikov à terre et des mots de réjouissances.
La liste pourrait bien s'allonger dans les jours à venir. Selon Les Échos, le ministère de l'Intérieur a annoncé il y a quelques jours avoir recensé plus de 3.000 messages faisant l'apologie des attentats contre Charlie Hebdo auprès de l'Office central de lutte contre la criminalité.
Sur Twitter, le hashtag #JeSuisKouachi a généré près de 40.000 tweets depuis mercredi, selon Topsy. Même si une grande quantité d'entre eux ont émané de la part d'utilisateurs interpellant le réseau social et dénonçant l'utilisation du hashtag.
En cas de poursuites judiciaires, Twitter doit mettre à disposition de la justice les données permettant d'identifier les auteurs des tweets illicites. Ces derniers s'exposent à sept ans de réclusion pour apologie par voie électronique d'un crime en relation avec une action terroriste. Le gouvernement tient d'ailleurs à renforcer l'arsenal législatif pour combattre la diffusion de ce type de messages.
Les policiers ont reçu des consignes très strictes de fermeté face à ces provocations. Ce qui explique les nombreuses interpellations survenues depuis ce week-end. À Valenciennes, un homme a écopé de quatre ans de prison ferme pour s'être félicité de la mort des policiers tués à Paris, lors de son arrestation en état d'ivresse après un accident de voiture.
À Cannes, un homme a été maintenu en détention jusqu'au 9 février dans l'attente de son jugement après avoir lancé à des policiers : "Ils ont bien fait à Paris, il ne faut pas insulter le prophète, je vais vous kalacher, les musulmans vont niquer la France". Un jeune de 18 ans comparaîtra mardi à Meaux pour avoir déclaré, en imitant le geste de la kalachnikov au passage d'un patrouille de policiers municipaux, "ils en ont buté quatre, c'est pas vous avec vos petits pistolets qui allez me faire peur, je prépare un truc".
Les policiers ont également été pris à partie dans la banlieue de Lyon : "Vive les assassins de la police", avait crié mercredi, un jeune homme en se présentant au commissariat de Saint-Priest. Jeudi, un autre avait hurlé "Allah akbar, déjà deux morts chez vous, allez vous faire enculer, fils de pute, c'est bien fait pour vous", en récupérant sa voiture placée en fourrière. Le même jour, un jeune homme de Vénissieux avait injurié des policiers lors d'un contrôle de police : "Toi aussi tu aurais mérité de te prendre une balle dans la tête".
Les comparutions sont très rapides devant les tribunaux. Et les premières peines prononcées très sévères. Un homme a ainsi écopé lundi de trois mois de prison ferme après avoir publié sur Facebook des photos de jihadistes et écrit "on a bien tapé, mettez la djellaba, on ne va pas se rendre, il y a d'autres frères à Marseille".
À Orléans, encore, un jeune de 20 ans a été condamné à six mois de prison ferme pour avoir crié "vive la kalach" jeudi dernier en direction d'un groupe de policiers croisé dans un centre commercial, et imité le bruit de l'arme en mimant la gestuelle d'un combattant tirant une rafale. Au tribunal, il a expliqué qu'il avait bu : "J'ai sorti ça comme ça et je m'en excuse."
De source judiciaire, ces interpellations dessinent les contours de profils très disparates mêlant à la fois des jeunes cherchant la provocation gratuite à des individus beaucoup plus inquiétants, déterminés, et parfois même déjà connus des services pour leurs liens avec l'islam radical.
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