En 1956, la justice française ignorait tout des notions d'emprise et de manipulation mentale. Cette année-là, se tient pourtant à Blois le plus extraordinaire procès du genre.
Une femme, Denise Labbé, accusée d'avoir tué sa fille de deux ans, parce que son amant, Jacques Algarron, le lui avait demandé. Elle suivait cet homme comme une ombre, elle était devenue son esclave sexuelle et ne pouvait rien lui refuser.
Pendant des mois, les enquêteurs se sont plongés dans la vie de ce couple qu'on présente comme diabolique. À la clé de cette liaison, une relation sadomasochiste au cours de laquelle la jeune maîtresse est peu à peu devenue la chose de son maître. Aveuglée par une passion perverse, elle commet le pire des crimes : tuer son propre enfant. Le juge d'instruction va avoir du mal à croire à ce scénario pourtant bien réel.
Deux mois et demi après la mort de Catherine, Denise Labbé avoue le meurtre. Elle livre aux policiers une confession spectaculaire : "J'ai été envoûtée par mon amant, Jacques Algarron, annonce-t-elle.
C'est lui qui m'a obligée à tuer Cathy, il disait que ça serait une preuve d'amour suprême". Elle était totalement sous emprise de ce militaire de 26 ans qui en avait fait sa "chose". Auparavant, elle avait déjà tenté de tuer trois fois sa fille.
L'amant dément les accusations, elle n'aurait rien compris à ce qu'il lui racontait. Après un non-lieu rejeté par la justice pour manque de preuves, Jacques Algarron sera finalement jugé aux assises avec son amante. Au procès, une femme, qui a eu une brève liaison avec Jacques Algarron, témoigne. "Il m'a dit un jour qu’un véritable amour devait vous rendre capable de tuer", dit la femme.
Ils se sont rendus compte de qui dominait qui dans ce couple absolument pervers.
Gilbert Thiel, ancien juge d'instruction
Les psychiatres sont également sollicités. Ils présentent Denise Labbé comme une "fille assez intelligente, un peu froide, qui parle comme une comédienne, détachée, elle parait sincère". Jacques Algarron est quant à lui dépeint comme "froid, énigmatique, grandiloquent".
"Ils se sont rendus compte de qui dominait qui dans ce couple absolument pervers. La perversité était du côté d'Algarron mais il y avait quand même une absence de résistance totale de Denise Labbé", indique Gilbert Thiel, ancien juge d'instruction et invité de L'Heure du crime.
Me Garçon, avocat de la mère, demande de la compassion pour cette fille inculte, influençable, soumise. L'avocat général requiert la peine de mort. Denise Labbé est finalement condamnée aux travaux forcés à perpétuité. Jacques Algarron écope lui de vingt ans de travaux forcés. "On ne pardonne pas le crime mais on reconnaît qu'elle est sincère, qu'elle est rongée par le remords", explique Frédéric Chauvaud, historien et invité de L'Heure du crime.
Mercredi 30 mai 2001, la France crée le délit de "manipulation mentale". Une entreprise qui équivaut "à la mise en place d'une domination totale de l’un sur l'autre dans une relation", indiquait dans Madame Figaro, l'avocate Sophie Soubiran, spécialiste du droit de la famille.
- Gilbert Thiel, ancien juge d'instruction et auteur du livre Femmes criminelles publié aux éditions Mareuil.
- Frédéric Chauvaud, historien, spécialiste de la justice pénale du XIXe et XXe siècle et co-auteur avec Gilles Malandin du livre Impossibles victimes, impossibles coupables : les femmes devant la justice publié aux Presses Universitaires de Rennes.
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