Le 6 avril 1972, Brigitte Dewère, une adolescente de 15 ans, fille de mineur, est retrouvée morte dans la commune de Bruay-en-Artois, dans le Pas-de-Calais. La jeune fille est décédée à la suite de strangulations et de coups. La veille au soir, elle avait quitté ses parents pour aller dormir chez sa grand-mère, quelques rues plus loin.
Rapidement, les témoignages désignent un homme, qui aurait été aperçu avec la jeune fille avant sa mort. Un notaire de la commune, un certain Maître Pierre Leroy. Interrogé, l'homme se montre peu persuasif face aux enquêteurs. Devant les contradictions de son discours, le juge Pascal, en charge de l'affaire, décide de l'inculper, sans preuve tangible.
L'affaire, qui se déroule après mai 68, s'emballe : le meurtre d'une jeune fille issue de la classe ouvrière par un notaire ne passe pas inaperçu. Chacun choisit alors son camp, les pro-juges et les anti-juges, les soutiens du notaire et ses détracteurs. Le crime investit rapidement le terrain politique.
Dans L'Heure du Crime dédiée à l'affaire de Bruay-en-Artois, Pascal Cauchy, maitre de conférence à Sciences Po et auteur de Il n'y a qu'un bourgeois pour avoir fait ça : L'affaire de Bruay-en-Artois aux éditions Larousse, revient sur l'impact politique de ce meurtre.
"Les faits divers, pour la gauche prolétarienne, sont l'occasion de raviver la lutte des classes. La lutte des classes que, pour eux, le Parti communiste a abandonnée. De telle sorte qu'un crime, un fait divers, devient l'objet, justement, d'une activité militante extrêmement intense (...) le crime de Bruxelles-en-Artois incarne parfaitement le crime de classe", explique le conférencier.
Un comité pour la vérité et la justice, rejoint par la famille de Brigitte et ses proches voit le jour. Malgré les voix qui soutiennent le combat du juge Pascal, ce dernier ne parvient pas à réunir des preuves suffisantes. Face au vide de l'enquête, la Cour de cassation dessaisit le juge Pascal, et confie le dossier à un autre magistrat, sans grand succès.
Classée en 1981, l’affaire a été officiellement prescrite en 2005. Un meurtre sans coupable et un crime devenu le symbole de la lutte des classes, au point d'en oublier presque la jeune victime, Brigitte Dewère.
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