C'est un exercice pour démontrer que la coopération militaire entre la France et l'Angleterre reste au beau fixe malgré le Brexit. L'armée de l'Air française et la Royale Air Force ont organisé une mission commune de police de l'air aux frontières de l'Europe de l'Est, une mission pour le compte de l'OTAN. Direction la Bulgarie. Deux avions de chasse Typhoon anglais patrouillent au dessus de la frontière avec l'Ukraine. Ils sont ravitaillés en vol par un avion français parti de la base aérienne d'Istres près de Marseille.
Nous avons pu monter à bord de cet A330 ravitailleur. Dans ses entrailles et ses ailes, 90 tonnes de carburant. Nous décollons juste après midi. Direction en ligne droite ou presque, la frontière Est de la Bulgarie et les bords de la mer Noire. Vitesse de croisière 600 km/h à 12.000 mètres d'altitude. Un petit coup d'œil sur les sommets enneigés des Alpes que nous laissons sur notre gauche et après 3 heures de vol, c'est le point de rendez-vous avec deux Eurofigther Typhoon anglais, les avions de combat qui vont opérer au dessus de la frontière.
Le ravitailleur descend alors à 7.000 mètres dans une épaisse couche de nuages. Manœuvre spectaculaire et toujours délicate selon le capitaine Romuald, le commandant de bord : "On se donne rendez-vous à un point précis et à une heure précise. Une fois qu'ils voient notre avion, ils nous rejoignent à vue. Là, ils se glissent derrière nous. Sous chacune de nos ailes, nous avons un "pod" d'où sort un tuyau flexible d'une trentaine de mètres. Il flotte avec à son bout une nacelle de la grandeur d'un panier de basket dans lequel le pilote de chasse va connecter sa perche de ravitaillement".
Ensuite c'est un véritable ballet aérien, d'une extrême précision, la carlingue du ravitailleur est à moins de 10 mètres du bout de l'ails des chasseurs, le tout à 500 km/h. Dans le cockpit, le "boomer", ou ARO (Air Refueling Operator), pilote le ravitaillement devant une impressionnante série d’écrans et d’instruments de contrôle. "Il faut faire attention aux vitesses de rapprochement, à la stabilité des appareils pour éviter tout risque de collision", explique le sergent-chef David. Le ravitailleur effectue un virage sur la gauche, les deux chasseurs suivent la manœuvre en formation serrée.
L'opération se déroule en retrait de la frontière, dans une sorte d'hippodrome virtuel. Une zone "protégée" dans laquelle tourne le ravitailleur, où ne vole aucun appareil civil. Le "plein d'essence" va durer une petite dizaine de minutes. Cette fois-ci, ce sont 4,5 tonnes de carburant qui leur sont délivrés. Un second ravitaillement s'effectuera dans cette même zone une heure et demi plus tard, le temps pour les Typhoon d'effectuer la totalité de leur mission de surveillance.
Affirmer notre volonté de défendre les frontières de l'Otan et de l'Europe
Capitaine Romuald, commandant de bord
Les deux chasseurs anglais avaient ce jour-là la mission de voler le long de la frontière entre la Bulgarie et l'Ukraine, en bordure de la mer Noire aussi peut-être, de surveiller cette frontière pour éviter toute intrusion, explique le capitaine Romuald : "En ce moment on est au-dessus de la Bulgarie mais ce type de mission se fait sur l'ensemble des frontières avec l'Ukraine, de l'Estonie au Nord jusqu'à la Bulgarie au Sud. C'est une mission de présence surtout pour affirmer notre volonté de défendre les frontières de l'Otan et de l'Europe".