La face cachée de la Une explorée par Alexandre de Saint Aignan. Ce mardi, le magazine Science&Vie nous raconte comment l’île de Pâques a réussi à échapper à la fin du monde.
C’est l’histoire d’une petite île, perdue au beau milieu du Pacifique. Autrefois couverte d’une forêt luxuriante jusqu’au jour où l’homme a débarqué. Un peuple inconscient et avide qui défriche, cultive, construit des villages et se multiplie en pillant les ressources de la nature. Les arbres sont abattus sans vergogne et la terre devient rapidement sèche et stérile. Il n’y a alors plus assez de nourriture pour tous les habitants, qui, affamés, en sont réduits à s’entretuer pour survivre…
Et c’est au cours de cette guerre que sont abattues les immenses statues, autrefois sculptées par les ancêtres. En plein sommet sur le climat à Glasgow, cette histoire dramatique et funeste sonne comme un avertissement, une mise en garde : 'voici le destin qui attend l'humanité si on continue à surexploiter les ressources de la Nature'.
Sauf que cette histoire, que l'on a longtemps cru être celle de l’île de Pâques, ne s'est pas du tout passée comme ça. Ce minuscule confetti de 165 km2, c’est tout simplement la terre habitable la plus isolée de la planète. Pour vous dire, la civilisation la plus proche est à plus de 2.000 km à l’Ouest.
Un éloignement qui explique que l’île de Pâques ne fut colonisée qu’à partir du XIIe siècle, par des Polynésiens, après plus de trois semaines en pleine mer, sur des pirogues à voiles. Il faudra attendre 1722 pour que les premiers explorateurs européens découvrent cette île du bout du monde. Et dès leur arrivée, plusieurs choses les frappent : il n’y a aucun arbre et des centaines de statues géantes ont été renversées.
Alors que s’est-il passé ? Les premiers habitants polynésiens sont-ils effectivement arrivés au bout des ressources de leur îlot ? C’est en tout cas la certitude d'un géographe américain qui sort un livre en 2005. Un best-seller, dans lequel il fait de l’île de Pâques, l’exemple même de l'écocide, autrement dit "la destruction irrémédiable par l’homme de son environnement".
Et il y a des preuves : des trous à compost, des barrages, des centaines de poulaillers en pierre. Le géographe américain en est certain. L’île a accueilli jusqu’à 10.000, peut-être même 15.000 habitants, entrainant une importante déforestation. Il ne reste plus d’arbres, et donc plus de fruits à manger, mais aussi plus de bois pour construire des pirogues, aller pêcher, construire des maisons ou même pour faire du feu.
Il ne reste alors plus que le cannibalisme et le renversement des Moai, ces imposantes statues de pierres, symbolisant les ancêtres. Une image d’apocalypse, comme si la Nature avait décidé de se venger des hommes, pour avoir été trop gourmands…
Sauf qu'une fois de plus, cette théorie laisse les scientifiques, sur leur faim. Première incohérence : les statues emblématiques de l’île de Pâques ont bien été couchées. Mais elles sont, dans leur grande majorité intactes, malgré leur matériau friable. Les nez et les mentons proéminents ne sont pas cassés. Rien ne permet d’affirmer qu’il y a bien eu une quelconque frénésie de violence.
Autre argument choc : un outil statistique au nom barbare, "la distribution de probabilités cumulées appliquée à l’archéologie". Pour faire simple : on étudie les traces d'une activité humaine. Plus il y en a, et plus ça signifie que la population était nombreuse. Et les derniers résultats sont formels : il n’y a jamais eu d’effondrement de la démographie.
Pas de massacre, pas de guerre civile. La population n’aurait en fait jamais dépassé les 5.000 habitants. Et pour cause : la croissance se serait progressivement ralentie à cause du changement climatique, accentué par la déforestation de l’île. Les habitants ont alors dû développer une agriculture adaptée On retrouve d’ailleurs sur place d’étonnants champs de cailloux. Des pierres volcaniques, disposées autour de jeunes plants pour les protéger du soleil, tout en retenant l'humidité de l’air.
Contrairement à ce qu’on a pu nous faire croire, l’île de Pâques, longtemps le symbole de la surexploitation de la nature, n’a donc jamais connu l’apocalypse. Au contraire, son histoire nous prouve qu’il n’est jamais trop tard, à condition quand même de savoir s’adapter.
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