Programme Nostradamus : quelle est cette innovation militaire de la guerre froide relancée par l'armée française ?

Un incroyable programme militaire secret français baptisé Nostradamus qui avait été abandonné dans les années 90 vient de ressusciter. Le nom de ce mage du XVIe siècle capable de prédire les malheurs d'aujourd'hui nous replonge vraiment dans les années de la guerre froide. C'est dans les années 70 et 80 que Nostradamus était devenu très populaire. 

Ce qu'on ne savait pas, c'est que c'était aussi le nom d'un programme militaire totalement dingue. Au cinéma, il y avait Star Wars, dans le cerveau de certains scientifiques de l'Onera (l'Office National d'Etudes et de Recherches Aérospatiales), il y avait Nostradamus. Ce programme cherche à inventer un rétroviseur géant capable de détecter des attaques qui viennent de plusieurs milliers de kilomètres. Pour y arriver, il faut pouvoir apercevoir l'attaque même quand elle vient de l'autre côté de la courbure de la terre. Quand elle vient du dessous de l'horizon.

Comment c'est possible ?

Tout se passe dans ce que les militaires appellent la "Très Haute Altitude", un endroit baptisé la "ionosphère", une bande dans l'espace située à 250 km au-dessus de nos têtes. Sur une ancienne base de l'ONU désaffectée située à Crucey, en Normandie, les scientifiques de l'ONERA ont érigé 288 antennes de 7 mètres de haut réparties en étoile (comme celle du logo de Mercedes). 

Ces antennes émettent des ondes qui rebondissent sur la ionosphère et partent de l'autre côté de la Terre. Puis l'onde revient à son point de départ si elle rencontre un obstacle de l'autre côté.

C'est le système le plus fiable pour repérer très vite un avion furtif qui part à plus de 3.000 km de chez nous ou un ballon espion très lent qui évolue dans la stratosphère. C'est ce qui était arrivé aux Américains qui avaient découvert un ballon chinois au-dessus de leur territoire.

Un programme pour anticiper une attaque russe ?

Le programme avait été imaginé au moment de la menace soviétique. En 1990, après la chute du Mur de Berlin, l'armée a stoppé le programme Nostradamus. Mais les scientifiques de l'Onera ont continué à entretenir le site de Crucey et ont poursuivi leur travail. Tout le monde a compris aujourd'hui que la guerre va se faire désormais en Très Haute Altitude, dans l'espace. 

La menace russe est de nouveau une réalité et Sébastien Lecornu, le ministre de la Défense a débloqué une enveloppe de deux millions pour que l'armée expérimente et modernise Nostradamus. Toutes les armées du monde investissent dans la Très Haute Altitude. On se demande parfois où vont aller les milliards du plan militaire européen de Défense dont on parlait beaucoup il y a quelques mois : en voici un exemple concret. Nostradamus, c'est le pouvoir d'avoir des yeux dans le dos et de regarder à 360 degrés sur des milliers de kilomètres.