Le N° 1 mondial de l’automobile change de
patron, et s’apprête à vivre une révolution. Le japonais Toyota, dirigé depuis 15 ans par le petit-fils du fondateur,
Akio Toyoda, s’apprête en effet à changer de tête. L’héritier avait porté 14
années durant le constructeur nippon au rang de numéro un mondial, avec 9
millions de véhicules produits l’année dernière. Un leader planétaire très
actif chez nous, puisque l’un de ses modèles, la Yaris, est la voiture la plus
fabriquée en France, dans l’usine de Valenciennes, dans le Nord.
Monsieur Toyoda a admis être un peu dépassé par l’évolution du secteur, l’extraordinaire
progression du véhicule électrique et des technologies embarquées pour assister
la conduite. Il faut dire que c’est le seul grand constructeur qui avait
publiquement pris ses distances avec l’électrique, en expliquant que c’était
une technologie que les acheteurs n’adopteraient pas facilement, et qu’elle
allait polluer au total plus qu’on ne l’imaginait – c’est loin d’être faux,
d’ailleurs. Toyota a fait le pari, lui, de l’hybride non rechargeable, qui
associe moteur à l’essence et électrique. Une formule dont la fameuse Prius
avait été la précurseure, il y a vingt-cinq ans. Du coup, c’est le patron de
Lexus, une marque du groupe, qui prend le volant, avec à charge de sortir 30
modèles électriques d’ici 2030.
Toyota n’a pas de véhicules électriques dans sa gamme aujourd’hui. Les Japonais sont très en retard sur cette technologie, et Toyota encore davantage. Il a sorti l’année dernière un véhicule appelé curieusement BZ4X, une catastrophe, puisque plusieurs milliers d’exemplaires ont dû être rappelés peu après le lancement, car les roues menaçaient de se décrocher. En fait, Toyota n’a pas pris le virage à temps et s’alarme d’être pris en sandwich entre Tesla, qui vient d’annoncer des profits de plus de 12 milliards pour l’année dernière alors qu’il a vendu 5 fois moins de voitures que le Japonais, et les Chinois. Sans compter Sony, qui a présenté il y a quelques jours la voiture qu’il a conçue avec Honda, une console de jeux sur roue. L’ironie du sort fait que c’est justement à Tesla que Toyota avait vendu une usine qu’il n’utilisait plus, aux États-Unis, qui est devenue le premier site historique de l’Américain.
Toyota est née dans le Japon belliqueux de l’entre-deux guerres, en 1937, l’année de l’invasion de la Chine par l’Archipel, alors que le pays rêvait de dominer l’Asie. L’entreprise industrielle, symbole de l’essor de l’Archipel, avait une particularité. Le patron Toyoda avait inventé une nouvelle méthode de production, le juste à temps, c’est-à-dire l’acheminement continu des pièces à l’usine de façon à éviter les stocks, coûteux à constituer et à entretenir.
Une révolution de l’organisation, associée, lors de la reconstruction d’après-guerre, à la responsabilisation des opérateurs pour améliorer la production de façon continue, ce qu’on a appelé le kaizen. Et à une obsession de la qualité. Le tout débouchera sur une mode planétaire de gestion des usines, appelée toyotisme. L’équivalent de ce qu’avait été le fordisme au tout début du XXème siècle avec le travail à la chaîne. Le toyotisme appliqué au nouvel âge de la voiture, à la fois électrique et intelligente, c’est le défi du nouveau samouraï de l’auto qui prendra ses fonctions au printemps.
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