La courbe du chômage ne se sera finalement pas inversée en 2015 : en décembre, le nombre de demandeurs d'emploi a augmenté de 0,4%. La politique de gauche peut-elle lutter encore efficacement contre le chômage ? “Si elle change radicalement de politique”, estime Pierre Larrouturou, président du mouvement politique Nouvelle Donne. “Depuis un an, on compte 300.000 chômeurs de plus et au moins 300.000 personnes qui ne sont plus comptées comme chômeurs parce qu’elles sont tombées dans la pauvreté. Cela fait des gens qui ont une vie au ralenti, qui ne cotisent plus pour les caisses de retraites, qui consomment moins : c’est toute la société qui est foutue en l’air”, dénonce-t-il.
Selon le président de Nouvelle Donne, croire en un retour prochain de la croissance “n’est pas sérieux”. “Cela fait 40 ans qu’on nous dit que la croissance revient, or le Japon est en récession, le Brésil est en récession, les États-Unis ralentissent. Ce que montre Nouvelle Donne, c’est qu’on peut, même sans croissance, protéger les salariés, créer des logements et des emplois. Mais il faut arrêter de croire au miracle de la croissance”, assure-t-il.
La France a besoin d'une économie plus compétitive, plus performante.
Thierry Pech, directeur du think tank Terra Nova
Une vision à laquelle Thierry Pech, directeur du think tank Terra Nova, ne se résout pas à souscrire. “On doit pouvoir faire mieux sans croissance, mais on ferait encore bien mieux avec de la croissance”, avance-t-il. Pour Thierry Pech, la France a donc besoin, au-delà d’une politique de soutien aux chômeurs, “d’une économie plus compétitive, plus performante”.
Comment peut-on relancer l’activité ? Pour Pierre Larrouturou, les chantiers pour la transition énergétique sont l’un des leviers possibles. “La Banque Centrale européenne (BCE) va créer 1.000 milliards qu’elle va donner aux banques, en espérant qu’elles seront gentilles et qu’elles financeront l’économie réelle. À Nouvelle Donne, nous proposons qu’au lieu de donner 1.000 milliards aux banques sans aucun contrôle, il faut les investir dans le sauvetage du climat. Pendant 20 ans, on financerait des travaux d’isolation des bâtiments et de développement des énergies renouvelables, ce qui permettrait de créer 200.000 emplois”, estime-t-il.
Autre exemple d’action possible : la question du logement. “La France est le pays d’Europe où les loyers sont les plus chers. Si on avait le même niveau de loyer qu’en Allemagne ou aux Pays-Bas, on fera tous 250 euros d’économies tous les mois. Il y a 27 milliards qui sont mis en réserve sur les marchés financiers : on peut utiliser ces fonds de réserve pour construire des logements et donner du boulot à 150.000 ouvriers”, estime Pierre Larrouturou.
Ce diagnostic est partagé par le président de terra Nova, qui ne propose cependant pas les mêmes solutions. “Aujourd’hui, il y a des choses très simples qui n’ont pas encore été mises en oeuvre. Par exemple, enlever le plan local d’urbanisme (PLU) des mains des maires pour le remettre aux intercommunalités, qui construiront davantage. Car on le sait, les maires français ne construisent pas assez, et organisent donc par cette politique la spéculation sur le foncier”, estime Thierry Pech.
Si l'on dit que 40 milliards seront débloqués pour isoler les bâtiments, cela vaut le coup de se former.
Pierre Larrouturou, président de Nouvelle Donne
Selon Pierre Larrouturou, la formation des chômeurs est fondamentale pour redresser l’économie, à condition qu’elle accompagne la création effective d’emplois. “Si l’on dit que 40 milliards seront débloqués chaque année pour isoler les bâtiments et que 200.000 emplois seront créés grâce à ce fonds européen, cela vaut le coup de se former”, estime-t-il.
“La formation professionnelle va souvent à ceux qui n’en ont pas besoin : c’est important de former les moins qualifiés et en particulier les chômeurs de longue durée. Mais on a un vrai problème d’offre, notre pays n’est pas assez compétitif”, renchérit Thierry Pech, pour qui la formation professionnelle sera efficace si elle s'accompagne de davantage de dynamisme économique.