La quasi-totalité des candidats de gauche à la présidentielle veut aligner le statut des indépendants sur celui des salariés, beaucoup plus favorable. Quant à François Fillon, le candidat de droite, il veut lui aligner ce même statut sur le celui des autos-entrepreneurs, non pas plus favorable sur le plan des droits, mais simplifié et moins coûteux.
Derrière ces propositions, il y a le même diagnostic : la sécu des indépendants, libéraux, artisans et commerçants ne marche pas. Il s’agit du fameux régime social des indépendants (RSI), qualifié non sans raison de "catastrophe industrielle" par la Cour des Comptes, à cause des bugs innombrables que connaît cette administration depuis sa création, en 2008.
Tous justifient leurs projets en expliquant que le travail indépendant va progresser. À les entendre, on a le sentiment que le salariat est en voie d’extinction. La réalité n’est pas du tout celle-là. Le travail indépendant pèse pour 10,6% de l’emploi en France aujourd'hui. Cela représente près de trois millions de personnes, dont les deux-tiers sont des hommes. C'est un peu plus qu’en 2001, où il avait connu son point bas de tous les temps, à un peu moins de 9% de l’emploi français. Mais c’est beaucoup moins qu'en 1970, où il comptait pour 20% de l’emploi total.
Contrairement aux idées reçues, l’emploi indépendant baisse en France. En cinquante ans, il a vu son poids dans l’économie divisé par deux, passant d’un emploi sur cinq à un emploi sur dix, à la louche. Mais attention. Cette chute s’explique principalement par l'effondrement du nombre d’agriculteurs, passés de deux millions en 1970 à 400.000 aujourd'hui. Quand on observe au contraire l’évolution du travail indépendant dans le tertiaire (les services et les commerces), on voit au contraire qu’il augmente dans la période récente. Il a progressé de 600.000 personnes depuis le point bas de 2001, soit une augmentation de 40%.
Ces nouveaux travailleurs indépendants sont des commerçants, des consultants, des chauffeurs de VTC, des personnes qui travaillent au moyen des plateformes de la nouvelle économie. Pour beaucoup, ils opèrent sous le statut d’autos-entrepreneurs.
Fusionner leur régime avec celui de la sécu des salariés, c’est une bonne idée pour eux. Car non seulement leur système ne marche au plan administratif, mais leur couverture sociale est très médiocre. Ils ont, par exemple, sept jours de carence, en cas de maladie, contre trois dans le secteur privé et zéro chez les fonctionnaires. Ils n’ont pas de congés payés, pas de droit au chômage, pas de minimum retraite. Leurs remboursements de Sécurité sociale sont bien souvent indigents.
Faire un régime unique est une très bonne idée. Le seul problème, c’est comment la financer. Aucun de nos candidats ne pipe mot là-dessus. Car aujourd'hui, si le régime social des indépendants est moins favorable, c’est parce que les cotisations des indépendants sont plus faibles que celle des salariés qui, eux, profitent des sommes payées par leur employeur pour leur assurer une protection sociale. Si l’on aligne les prestations pour ne faire qu’un seul régime, il n’y a donc que deux solutions : augmenter les cotisations des indépendants - ce qui serait dramatique pour eux - ou creuser le déficit.
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