En plein débat sur la vaccination, trop lente, ou trop rapide, selon les positions. Ce matin on va s'intéresser aux anti-vaccins. Tout d'abord, sachez que ces vaccino-sceptiques sont aussi anciens que les vaccins eux-mêmes. Il suffit de lire Marianne cette semaine pour s’en convaincre.
Connaissez-vous lady Mary Wortley Montagu ? C’est une écrivaine britannique du XVIIIe siècle, une intellectuelle brillante. En 1716, elle observe chez les femmes de Constantinople une pratique connue en Chine depuis l’an 1000 : inoculer à un sujet sain du pus prélevé sur un malade de la variole pour provoquer une réponse immunitaire.
À l’époque, la variole c’est 10% de la mortalité infantile, ainsi, pour protéger son enfant, Lady Montagu s’en remet donc à la médecine populaire du Levant. Puis elle importe la variolisation en Europe, mais les médecins crient au charlatanisme. Pour des raisons tout sauf scientifiques en réalité : ils dénoncent la "féminité" d'un procédé "barbare", porté disent-ils par une "mondaine". Les bigots s’en mêlent, ils voient là un "attentat contre la providence". Ce sont les premiers antivax.
Le contre-argument est mathématique: en 1724, un médecin établit pour la première fois une balance bénéfice-risque. Résultat : la probabilité de mourir de la variole est de 7%, alors que la variolisation présente un risque de 2%.
En France, le débat déchire l’académie royale des Sciences, et les philosophes des Lumières. La polémique monte d’un cran quand le père de l’immunologie, Edward Jenner, met au point le premier vaccin antivariolique, en 1796. Son produit de base, c’est la vaccine, la variole de la vache, qui est moins virulente. Toutefois, ce médicament provenant des animaux crée un scandale.
Les vagues de morts persistent, car la vaccination n’a qu’un effet temporaire mais ça, les États ne le savent pas. Alors, ils essaient de dissimuler la situation, ce qui est pire que tout, bien sûr. L’info circule entre les groupes vaccinophobes de tous les pays. Dans les milieux populaires comme dans les milieux savants, la vaccination est accusée de tous les maux, notamment de propager la syphilis.
Avec la guerre de 1870, il y a un regain épidémique et la vaccination devient obligatoire en Allemagne et en Angleterre. Toutefois, des villes comme Leicester se rebellent. À l’entrée des usines anglaises, les travailleurs qui refusent le vaccin sont refoulés et des émeutes éclatent. Les ouvriers récalcitrants voient même leurs biens saisis. En France, la loi qui rend le vaccin obligatoire est retoquée.
Dans la foulée une Ligue internationale des antivaccinateurs est créée. Elle dénonce sans relâche le "pactole" dépensé par l’État. Les fondements du mouvement antivax sont posés et les progrès de la science n’y changeront rien. L’Institut Pasteur est décrit comme une "usine à virus qui fabrique des maladies".
Au début du XXe siècle, l’épidémie de grippe espagnole fait au bas mot 25 millions de morts dans le monde et les deux guerres mondiales changent la donne : désormais, refuser la vaccination des troupes, c’est trahir la patrie. Dans l’Europe en ruine de 1945, les politiques de vaccination nationales permettent de faire face à la tuberculose, première cause de mortalité en France. Quand le vaccin contre la polio devient obligatoire, en 10 ans on passe d’environ 4.000 cas à 68. Le mouvement antivax s’enlise. Il survit chez les jeunes écologistes hostiles à la médecine moderne et les admirateurs du "retour à la terre" cher au régime de Vichy.
Mais au tournant du millénaire, ce qui fait beaucoup de mal, c’est cette étude qui semble prouver que le vaccin rougeole-oreillons-rubéole est un facteur d'autisme. Six ans plus tard, on découvre que l’étude en question portait sur 12 enfants seulement, certains n’étaient même pas autistes, d’autres l’étaient déjà avant leur vaccination. Il s’agissait en fait d’une vaste tromperie pour vendre un autre vaccin.
Les responsables ont été condamnés en 2010, mais la légende court encore. Ajoutez à cela le militantisme d’un Pr Henri Joyeux, les polémiques sur les sels d’aluminium, le scandale du Mediator et une communication officielle au mieux maladroite, au pire mensongère. Aujourd’hui c’est la rhétorique antivax qui est devenue virale, et la rougeole et la tuberculose sont de retour. La saga des anti-vaccins, c'est à lire dans Marianne.
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