Dans un rapport rendu public mercredi 29 novembre, la Cour des comptes prescrit son ordonnance à l'Assurance maladie. Son objectif ? "Assurer l'efficience des dépenses" et "responsabiliser les acteurs". Dans ses conclusions, l'institution de la rue Cambon pointe "des politiques de maîtrise de la dépense trop souvent mises en défaut" et constate que "la situation globale de la branche maladie reste très préoccupante."
Après avoir fait ses comptes, la Cour explique en effet que contrairement aux branches famille et vieillesse, qui sont "presque" revenues à l'équilibre ou dégagent un léger excédent, "l'assurance maladie voit son déficit perdurer."
Il s'élèverait à 4,1 milliards d'euros en 2017, selon les prévisions du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2018 et représenterait "75% du déficit total estimé du régime général." L'Assurance maladie "n'a pas retrouvé l'équilibre depuis 25 ans", bien que Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des comptes publics, et Agnès Buzyn, ministre de la Santé, prévoit un retour à l'équilibre en 2019. Voilà pour les chiffres. Mais les sages formulent également des propositions - parfois explosives - pour remédier à cette situation "dangereuse"
La première est l'instauration d'une règle d'équilibre "obligeant à présenter et à voter ses comptes sans déficit" en prévision "des perspectives d'augmentation soutenue des dépenses de santé, portée par les gains d'espérance de vie, par le vieillissement de la population et par la hausse des prix des investissements et des produits médicaux."
La Cour des comptes préconise par ailleurs d'agiter la menace du déconventionnement auprès des médecins pratiquant des dépassements d'honoraires. L'objectif visé ? Porter "un coup d'arrêt" à cette pratique. L’année 2016 a marqué un record, avec 2,66 milliards d’euros de dépassement d'honoraires facturés, précise la Caisse nationale d'Assurance maladie, citée par Le Monde. En cas de non-respect, le médecin serait ainsi exclu du conventionnement du professionnel de santé.
Une sanction synonyme de déremboursement pour les patients, la consultation chez un médecin non conventionné n'étant remboursée qu'entre 60 centimes et 1,20 euro par la Sécurité sociale.
En finir une bonne fois pour toute avec les déserts médicaux. "Pour obtenir un rééquilibrage" de la répartition géographique des médecins, la Cour des comptes veut remplacer leur liberté d'installation par le "conventionnement sélectif", déjà appliqué aux infirmiers et aux sages-femmes.
Deux options sont envisagées : une mesure limitée aux "zones les mieux dotées", ou un dispositif national avec "un nombre cible de postes conventionnés" dans chaque territoire. Le rapport évoque aussi la possibilité de forcer les jeunes diplômés à exercer "dans des zones sous-denses pour une durée déterminée" avant de s'installer en libéral.
L'enjeu est aussi financier, une répartition homogène des médecins libéraux sur le territoire pouvant générer des "gains potentiels d'efficience" de 800 millions à 1,4 milliard d'euros selon le rapport. D'autres formes de contrainte financière sont proposées, comme la création d'"enveloppes limitatives" par région pour "limiter le nombre d'actes et de prescriptions" des médecins libéraux.
Les magistrats conseillent en outre de lier "une partie des rémunérations des médecins" à leur participation à la permanence des soins, pour remédier à leur "disponibilité insuffisante, en particulier tôt le matin ou en soirée" et ainsi désengorger les urgences hospitalières.
Pour mener à bien ces réformes "multiples et complexes", la Cour des comptes recommande d'envisager la création d'une Agence nationale de santé, visant à rendre plus cohérente la mise en oeuvre des politiques de santé en regroupant les compétences de l'État, responsable des hôpitaux, et de l'assurance-maladie, responsable des libéraux. "Cette agence qui aurait autorité sur les ARS, disposerait de l’ensemble des instruments aujourd’hui dispersés entre plusieurs institutions et organismes."
À ne pas confondre avec l'agence nationale de santé publique, rebaptisée Santé publique France, "qui a pour mission de protéger efficacement la santé des populations".
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