Une semaine après les manifestations de taxis, les VTC répliquent. Des chauffeurs de transports LOTI (transports collectifs à la demande), secteur étroitement lié aux plateformes de voitures de tourisme avec chauffeur (VTC), manifestent ce mercredi 3 février à Paris. Ils estiment avoir été sacrifiés par le gouvernement en "gage de paix sociale" aux taxis.
A la mi journée, plusieurs centaines de véhicules VTC convergeaient vers l’esplanade des Invalides. En klaxonnant, ils affichaient des drapeaux et des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : "Valls m'a tuer", "VTC en danger" ou encore "Déconne pas Manu, ça sert à rien la haine" pour parodier une chanson de Renaud. Aucun incident majeur n'était à déplorer au sein du cortège, hormis quelques jets d’œufs sur une voiture de taxi à Montparnasse (XIVe arrondissement), mais rien de bien méchant.
La semaine dernière, le gouvernement, en butte à un énième mouvement de colère des taxis, avait annoncé des mesures pour lutter contre l'utilisation détournée des licences LOTI par les plateformes électroniques de réservation de VTC. Le secrétaire d'État aux Transports a ainsi envoyé vendredi 29 janvier des mises en demeure à une vingtaine de ces plateformes. Uber, SnapCar, Chauffeur-Privé, etc. se sont vu rappeler que les LOTI s'appliquent aux transports collectifs et non particuliers.
Mais la crainte des LOTI est de ne plus pouvoir du tout utiliser les plateformes, et ces entreprises disent d'ailleurs soutenir leur mouvement. "On estime à 10.000 à peu près le nombre de personnes, de chauffeurs professionnels qui paient des charges dans des sociétés et qui pour certains emploient des chauffeurs, qui travaillent en France dans le métier du transport de personnes, à qui aujourd'hui on est en train de dire : finalement vous n'avez plus le droit d'utiliser des plateformes numériques", juge Pierre-Dimitri Gore-Coty, directeur général d'Uber pour l'Europe, l'Afrique et le Moyen-Orient. "Uber en tant que plateforme soutient évidemment cette démarche et toutes les initiatives qui pourraient émerger autour de ces capacitaires qui pour nous n'ont aucune raison de ne plus avoir le droit de travailler".
Yves Weisselberger, PDG de SnapCar, a pour sa part déclaré : "On a informé nos chauffeurs [de la mobilisation] et on leur a dit que ce serait très bien s'ils pouvaient y participer". Sur le fond du dossier, "à notre sens, il n'est pas nécessairement illégal d'utiliser ces chauffeurs", ajoute-t-il. SnapCar recourt à "15-20%" de LOTI, mais sur l'ensemble du secteur ce serait plutôt un tiers, confie-t-il.
Ces licences, dans leur application aux VTC, "étaient une zone grise. C'est devenu une zone noire jeudi dernier" avec la mise au point du gouvernement, reconnaît pour sa part Bertrand Altmayer, président de la plateforme Marcel. En revanche, "il y a beaucoup de chauffeurs qui ont des familles, qui utilisent cette licence et qui vont se voir priver de boulot du jour au lendemain. Il y a toute une économie derrière, loueurs, assureurs, centres de formation, banques", prévient-il.
Les LOTI veulent donc exprimer leur point de vue et expliquer "toute l'ampleur que ces mesures vont avoir", renchérit Joseph François. "Ce n'est pas en nous livrant sur la place publique comme gage de paix sociale [avec les taxis] que ça va résoudre le problème". Cette mobilisation se produit alors que l'entrée dans la profession de VTC est de facto suspendue depuis le 1er janvier, faute de texte gouvernemental sur la formation.
La manifestation ne fait toutefois pas l'unanimité et "toutes les organisations de VTC existantes et connues ne sont pas pour cette marche-là, élaborée par les applications", assure Farid Aïeche, du Syndicat des exploitants du transport de personnes (SETP). "Elles demandent à des chauffeurs LOTI de manifester en leur nom pour demander au gouvernement de pouvoir travailler dans l'illégalité, ce qui est un comble". De son côté, Helmi Mamlouk, président de l'Union des chauffeurs capacitaires et VTC (Capa-VTC), n'est pas tendre avec l'association organisatrice qu'il qualifie d'"association fantôme" "dont le président est un dirigeant de société ayant 135 chauffeurs Uber". Helmi Mamlouk demande "ainsi que toutes les organisations syndicales de VTC, appellent clairement au boycott de cette fausse manifestation".
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