"Je n’ai jamais eu besoin d'un médecin lors de mes quatre accouchements, seule la présence d’une sage-femme était suffisante", raconte Alice, 36 ans. Après avoir accouché de son premier enfant dans l'eau, dans "une maternité très en avance sur l’accouchement naturel et physiologique" il y a 13 ans en Angleterre, Alice tombe à nouveau enceinte en France. Elle choisit avec son époux l'option accouchement assisté à domicile (AAD). En cause ? Des récits trop négatifs des hôpitaux et maternités alentour, explique-t-elle à Girls.
"Cela nous rassurait plus d’avoir notre enfant à la maison plutôt qu’à l’hôpital. Nous avons dû faire nos propres recherches pour trouver une sage-femme qui pratiquait les accouchements à domicile. Nous avons trouvé Julie, une sage-femme… anglaise !", ajoute Alice.
Chloe, blogueuse britannique qui a également accouché à domicile en France, raconte dans une vidéo postée sur YouTube l'année dernière cet événement intime de sa vie, justement parce que, selon elle, il n'y a pas assez d'histoires positives à ce sujet.
"Ce que j’ai adoré dans mon accouchement", explique Chloe tout en tenant contre elle son petit Louis, "c’est que j’ai été traitée comme une femme traversant un processus naturel au lieu d’une patiente au bord de la catastrophe", raconte la blogueuse qui a donné naissance à son fils dans sa maison de campagne, auprès de son compagnon et d'une sage-femme à l'écoute de ses besoins, lui faisant confiance sur ses capacités à mettre au monde son bébé.
En France, les accouchement hors maternité sont rares, de l'ordre de 1% (environ 5.000 en 2016), souligne une enquête de l'Insee, publiée en août 2017. Marie-Hélène Lahaye explique cependant dans son ouvrage Accouchement, les femmes méritent mieux (éditions Michalon) que "le processus de la naissance est autonome, basé sur une succession de réflexes, d’ajustement anatomiques et de procédés biologiques". L'accouchement aurait été, selon la juriste et auteure du blog "Marie accouche là", monopolisé par la médecine et les hôpitaux, retirant aux femmes cette expérience unique de pleine puissance.
Hormis les grossesses à risques, n'importe quelle femme aurait donc la force physique, comme mentale de faire naître un bébé, n'en déplaise au conseil de l'Ordre des médecins et aux pouvoirs publics, loin d'encourager la procédure. Plusieurs sage-femmes ont par exemple été obligées de s'expliquer sur leur pratique, peut-on lire dans un article de Slate, tandis qu'Alice raconte un rendez-vous avec un gynécologue peu compréhensif :
"Lorsque je lui ai annoncé que nous avions pris la décision d’accoucher à la maison il m’a répondu que ce n’était qu’une sage femme sans plateau technique n’était rien et qu’accoucher à la maison revenait à accoucher seule dans un champs. Je suis sortie de son cabinet en larmes."
La mission de la sage-femme, dans un accouchement à domicile ou en maison de naissance, précise Marie-Hélène Lahaye dans son ouvrage, "est de préserver la physiologie et de mettre en place toutes les conditions tant matérielles qu’affectives assurant à la parturiente un confort maximal lui permettant de mettre son enfant au monde".
C’est mon corps qui a fait sortir mon bébé ou mon bébé qui est sorti tout seul
Nathalie, 40 ans
Nathalie, 40 ans, a fait l'expérience pour son deuxième enfant d'un accouchement non assisté dit "inopiné", c'est-à-dire que ce dernier n'était pas prévu et que le bébé devait voir le jour à la maternité.
Au moment de la naissance de cet enfant, Nathalie était complètement seule chez elle, son compagnon en route pour venir la chercher et la conduire à la maternité. "J'ai eu l'impression d'être passée dans un mode très instinctif, un peu primaire et animal", décrit-elle à Girls, faisant écho au récit de Chloe dans sa vidéo YouTube.
"Je n'ai pas le souvenir d'avoir intellectualisé le moment", poursuit Nathalie. "C’est mon corps qui a fait sortir mon bébé ou mon bébé qui est sorti tout seul. Je me suis reconnectée avec la réalité une fois que j'ai eu ma fille dans les bras et que je me suis assurée qu'elle n'ait pas froid", poursuit cette mère de trois enfants, dont le dernier est né lors d'un accouchement à domicile, cette fois supervisé par la présence d'une sage-femme. Son mari et ses enfants étaient présents dans la pièce d'à-côté.
Cette fois, Nathalie vit un "parcours beaucoup moins instinctif". Sa sage-femme la forme sur la physiologie de l'accouchement, lui fait prendre conscience de tous les risques liés à un accouchement de ce type. "Un parcours passionnant mais émotionnellement intense", résume Nathalie qui explique qu'elle n'aurait jamais choisi d'entreprendre un second accouchement non assisté.
"Je crois très fort en la capacité des femmes à accompagner leur enfant mais je crois aussi très fort au besoin d'une vigilance prof