Bruno Lemaire a administré une véritable soufflante à l'électricien public et, indirectement, à son patron, Jean-Bernard Levy, lors du grand jury RTL-LCI, dimanche 29 septembre. Ce sont les déboires de l'EPR, le réacteur nucléaire de nouvelle génération, qui ont suscité l'ire lemairienne. Sur tous les chantiers en Europe, les retards et les surcoûts considérables s'accumulent. "Toutes ces dérives sont inacceptables", a dit le ministre, "elles ne sont pas à la hauteur de ce qu'EDF représente et de l'expertise française en la matière".
Plusieurs chantiers sont concernés. En Finlande, le prototype d'Okiluoto était sur le point d'être mis en service, mais il a fallu différer à nouveau, après quinze ans de contretemps et plus de 10 milliards d'euros d'investissement. En France, à Flamanville, on a appris cet été que la tranche EPR en construction ne serait pas en service avant 2022, soit 10 ans de retard par rapport au projet initial, avec un coût réévalué à sept reprises pour atteindre les 11 milliards (3 fois plus que l'estimation de départ).
Et en Angleterre, pour le gigantesque projet de Hinkley Point, EDF a annoncé un premier retard, qui serait d'une quinzaine de mois, et un surcoût qui pourrait atteindre 3 milliards d'euros pour les deux réacteurs. En bref, c'est une bérézina industrielle.
Pas forcément. Car il y a deux EPR qui fonctionnent, et apparemment très bien, en Chine, à Taishan. Les Chinois ont même fini la construction avant la date prévue ! Bien sûr, ils ont profité des erreurs et des plâtres essuyés sur les premiers chantiers en Europe, c'est ce qu'on appelle la courbe d'expérience.
Alors voilà la question qui se pose aujourd'hui : EDF sait-elle encore construire des centrales, avec des normes de sécurité de plus en plus exigeantes ? Il y a un doute.
Mais on était quand même, sinon les premiers, du moins parmi les meilleurs au monde. Sur le papier, on le reste. Il n'y a guère que Rosatom (en Russie), Westinghouse (aux États-Unis), EDF, et maintenant les Chinois. Mais EDF n'a pas construit de centrales depuis plusieurs décennies. Le savoir-faire s'est perdu.
Bruno Le Maire a commandé un audit à Jean-Martin Folz, un patron à la retraite, qui a dirigé notamment Peugeot-Citroën. Cet audit sur la filière et les difficultés d'EDF sera remis à Bercy le 31 octobre, et pourra, dit le ministre, avoir des conséquences à tous les étages, y compris chez EDF. On ne saurait être plus clair.
Bruno Le Maire a dit hier : ce ne sont pas les Français. Il s'est peut-être un peu avancé. En Finlande, il y a eu un accord avec le client, après des années de litige. Et la note est portée au débit d'Areva, fournisseur français des réacteurs, dont la faillite est payée par le budget français - c'est vous, c'est moi.
Pour Flamanville, c'est EDF qui va payer, c'est-à-dire in fine les clients. Quant à Hinkley Point, le prix de l'électricité qui sera vendue est déjà fixé. Donc ce ne seront pas les Britanniques qui paieront.
Heureusement, la baisse des taux d'intérêt permettra à EDF d'absorber une partie des surcoûts. Mais ce premier débordement fait résonner étrangement la démission du directeur financier d'EDF, en 2016, à cause des risques que faisait peser Hinkley Point sur EDF, qu'il estimait déraisonnables.
Bienvenue sur RTL
Ne manquez rien de l'actualité en activant les notifications sur votre navigateur
Cliquez sur “Autoriser” pour poursuivre votre navigation en recevant des notifications. Vous recevrez ponctuellement sous forme de notifciation des actualités RTL. Pour vous désabonner, modifier vos préférences, rendez-vous à tout moment dans le centre de notification de votre équipement.
Bienvenue sur RTL
Rejoignez la communauté RTL, RTL2 et Fun Radio pour profiter du meilleur de la radio
Je crée mon compte