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Michel Houellebecq en juillet 2019
Crédit : XAVIER LEOTY / AFP
C'est le roman le plus attendu de 2022, le nouveau Michel Houellebecq. Son titre est un programme à lui tout seul, Anéantir. Il paraîtra ce 7 janvier 2022 chez Flammarion. Mais RTL l'a lu en avant-première. Une fois de plus, Houellebecq nous bluffe par sa capacité à s'emparer de l'époque et à en faire une toile de fond visionnaire : nous sommes en 2027, année d’élection présidentielle avec un président sortant, clone de Macron, un candidat qui n’est pas sans rappeler Cyril Hanouna, des vidéos pirates qui sèment l’angoisse et une vague d’attentats tous azimuts contre des porte-conteneurs chinois, une banque de sperme, une embarcation de migrants qui affole la DGSI…
Mais en parallèle à ce qui ressemble à un roman d’action, Michel Houellebecq développe un drame plus intime. Son personnage principal, Paul Raison, dont le couple bat de l'aile, haut fonctionnaire et conseiller du ministre des Finances, est appelé au chevet de son père, plongé dans le coma à la suite d'un AVC… Le cœur du nouveau roman de Houellebecq est là… L’auteur de Soumission se penche sur le thème de la fin de vie, de son accompagnement et de la maladie avec compassion et humanité. Si l'issue est sans espoir, la solidarité d'une famille, l’amour d'un couple sont omniprésents ici. Houellebecq va même jusqu'à écrire que "famille et conjugalité sont les deux pôles résiduels autour desquels s'organise la vie des derniers occidentaux en cette première moitié du XXIe siècle."
Intelligemment, l'auteur échappe à la caricature de lui-même. Il fait d'Anéantir un grand livre, à coup sûr, son plus bouleversant. Houellebecq tombe enfin le masque de la provocation et du cynisme pour afficher le visage de l'empathie. Anéantir est bien sûr un chant funèbre mais irradié par l’amour et la possibilité du bonheur...
Michel Houellebecq a choisi de ne pas s'exprimer devant les micros et les caméras à l'occasion de la sortie de son nouveau roman. Pour savoir comment l'écrivain a travaillé, nous avons mené notre propre enquête. Premiers indices : les remerciements de l'auteur à la fin de son livre. Houellebecq évoque ses rencontres, ses échanges de mails, ses consultations avec des médecins dont certains ont pris position contre l'euthanasie dans l'affaire Vincent Lambert. Il cite notamment le docteur Bernard Jeanblanc, aujourd'hui à la retraite. Il dirigeait en Alsace un centre d'accueil aux handicapés et il a inspiré au romancier un personnage admirable de médecin, le docteur Leroux. Bernard Jeanblanc raconte le jour où Michel Houellebecq a débarqué dans son centre pour y repérer chaque détail.
Dans les remerciements de l'auteur de Soumission, aucune référence par contre à Bercy, au ministère de l'Économie et des Finances. Surprenant car c'est l'un des lieux majeurs du livre, là où évoluent son personnage principal, Paul, haut fonctionnaire, et son patron, le ministre, prénommé Bruno comme l'actuel locataire de Bercy. Or Michel Houellebecq semble connaitre parfaitement ce décor. Et pour cause, l'écrivain est bien un familier des lieux !
Houellebecq et Bruno Le Maire se sont connus dans des circonstances singulières. Il y a une quinzaine d'années, le ministre de l'Économie est intervenu pour aider l'écrivain à rapatrier en France la dépouille de son chien mort en Irlande. Les deux hommes sont devenus amis, Houellebecq dîne régulièrement à Bercy et, il y a 2 ans, faisant part de son projet de roman à Bruno Le Maire, il a souhaité visiter tous les locaux du ministère. Imaginez la tête des fonctionnaires quand ils ont vu arriver Houellebecq avec son plateau repas à la cantine ! L'auteur de Soumission a également arpenté les longs couloirs de Bercy, les bureaux, l'appartement de fonction du ministre. Autant d'endroits que l'on retrouve dans le roman...
Et comme par hasard, Houellebecq a donc prénommé le ministre de son roman, Bruno... On ne peut s'empêcher de chercher les ressemblances avec son modèle. Par exemple, le Bruno du roman déclame par cœur des vers d'Alfred de Musset à la fin d'une réunion avec ses collaborateurs comme le fait aussi Bruno Le Maire. Mais Houellebecq a malicieusement rassuré son ami en lui disant : "Ne t'inquiète pas, on ne te reconnaitra pas, mon ministre Bruno, n'est pas normalien comme toi... il est polytechnicien". Quoi qu'il en soit, le portrait élogieux brossé Houellebecq de ce ministre entièrement dévoué au service du pays qui a réindustrialisé la France de 2027 ne déplaît pas à l'actuel occupant de Bercy.
Le nouveau livre de Michel Houellebecq est aussi un objet singulier. Rien à voir avec un roman habituel, à la couverture souple, ce qu'on appelle un livre broché. Anéantir est en édition reliée sous une couverture rigide cartonnée avec un signet rouge, ce petit ruban qui sert de marque-page... comme on le fait pour une édition de luxe. Aucun écrivain n'a eu droit à un tel traitement de faveur, a fortiori pour un ouvrage dont le premier tirage est de 300.000 exemplaires. Houellebecq, qui se désolait que ses livres précédents vieillissent mal, a supervisé lui-même toute la fabrication. Le prix reste malgré tout raisonnable : 26 euros pour 730 pages.
La couverture du roman "Anéantir" de Michel Houellebecq
Crédit : Flammarion
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