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Tuerie de Chevaline : quels sont les nouveaux éléments de l'enquête ?
En 2012, à Chevaline (Haute-Savoie), trois membres d'une famille britannique en vacances et un cycliste savoyard sont tués par un mystérieux tireur, sur un petit parking en pleine forêt. Les enquêteurs continuent d'explorer des dizaines de pistes, sans succès à ce jour.
Le 5 septembre 2012, entre 15h29 et 15h40, un massacre est commis sur la route forestière de la Combe d'Ire à Chevaline, un village de Haute-Savoie. En l'espace de quelques minutes, trois membres de la famille al-Hilli, des Britanniques d'origine irakienne en vacances, ainsi que Sylvain Mollier, un cycliste savoyard de passage, sont tués. Les quatre corps sont retrouvés criblés de balles. Les deux petites filles de la famille al-Hilli, âgées de 4 et 7 ans, échappent miraculeusement au tueur. Que s'est-il passé ? Qui est l'auteur du quadruple assassinat ? Des questions qui demeurent en suspens.
Une reconstitution en présence des magistrats, des enquêteurs et des avocats des victimes, dans une ancienne base militaire de l'Essonne, ordonnée par la juge Sabine Khéris du pôle cold-case le 17 octobre 2024, a tenté d'évaluer le professionnalisme du tireur, selon des informations du Parisien confirmées à RTL.
Le timing des tirs, établi par les investigations, est en effet stupéfiant. D'après une synthèse récente de l'enquête que nous avons pu consulter; il y a eu 21 tirs en moins de deux minutes, dont 18 qui ont atteint leur cible, c'est à dire une des quatre victimes. Autre élément crucial qui intrigue les enquêteurs depuis le premier jour, le meurtrier a utilisé un pistolet ancien, un Luger P06 de calibre 7,65 mm Parabellum, une arme fabriquée en Suisse en 1935 d'après une expertise récente.
Enfin, plusieurs tirs spécifiques dit "fichant", c'est à dire à bout portant et faits pour tuer, ont été relevés lors des autopsie. Or ces tirs sont enseignés en France uniquement aux seins des services actions de la DGSI ou de la DGSE, ou au sein des forces spéciales françaises ou suisse, d'après un instructeur professionnel de tir, consultant auprès de l'armée de terre, interrogé par les enquêteurs en juin 2023. L'hypothèse d'un tireur aguerri, ayant reçu une formation et possiblement ancien militaire ayant "vriller" selon le consultant, a donc un temps été évoquée.
D'après les informations de RTL la reconstitution d'octobre dernier, qui visait à remettre en scène divers scénarios de tir, a relativisé cette hypothèse d'un militaire d'élite spécifiquement formé, sans l'écarter totalement non plus. De nombreuses investigations restent en cours notamment en Suisse au sein des clubs de tirs et autour de l'arme, dont les gendarmes espèrent un jour trouver le propriétaire.
Pistes internationales et nouvelles analyses ADN
Depuis 2012, les enquêteurs continuent par ailleurs d'explorer des centaines de pistes, qui aboutissent parfois à des coïncidences. En 2020, un lien a été envisagé avec un cold case de 2011 impliquant une arme suisse, celui de la disparition de Xavier Baligant, un touriste belge abattu à Malvaux (Meurthe-et-Moselle). La piste d'un citoyen danois, dont la présence sur les deux scènes de crime a initialement révélée en 2021 par un analyste criminel qui a croisé les bases de données des les deux affaires, a été finalement écartée après une série de vérifications, selon les informations de RTL.
Une dimension américaine au massacre ?
À la demande de la juge Khéris, de nouvelles comparaisons ADN ont été lancées en 2023 et 2024, parfois dans toute l'Europe. Des scellés de la scène de crime, tels que deux mégots de cigarettes, et les vêtements de certaines victimes notamment, sont en cours d'analyse pour tenter de révéler des traces ADN jusqu'ici passées sous les radars grâce aux techniques récentes. Par ailleurs une ancienne trace d'ADN est en cours de comparaison avec le fichier des empreintes génétiques autrichien.
Illustration de difficulté de l'exercice : une autre comparaison avec un élément pileux retrouvé dans la voiture des Britanniques avait abouti à une citoyenne dominicaine, dont la trace génétique avait été enregistrée en France dans un procédure pour violence, et aujourd'hui installée en Espagne. Là encore la piste a été écartée après un interrogatoire au vu de son emploi du temps. La trace matchait également avec l'ADN de la soeur d'une victime....
Autre volet fascinant de l'affaire, la dimension américaine. Le jour même du massacre, le 5 septembre 2012, le premier mari américain d'Iqbal al-Hilli, la mère de famille tuée sur le parking de Chevaline, décédait d'une crise cardiaque aux États-Unis. Découvert seulement en 2013 par les enquêteurs français et objet de plusieurs commissions rogatoires internationales, ce fait troublant n'a fait à ce jour l'objet que de "retours très partiels" de la justice US selon un PV de synthèse dressé par les enquêteurs début 2023.
Un médecin légiste américain a conclu à la mort naturelle de J.Thomson, cet ancien mari dont Iqbal al-Hilli était séparée depuis 2000. Les maigres investigations menées par la justice américaine ont écarté un lien entre la tuerie et le décès. Mais la coïncidence hante les membres de la famille de J. Thomson, notamment sa fille, convaincue que c'est Iqbal al-Hilli qui était au cœur d'un complot international en raison de ses anciennes activités professionnelles, ce qui aurait coûté la vie à sa famille et ses proches. Rien n'est jamais venu étayer cette thèse. Les gendarmes souhaitaient pourtant en 2023 que de nouvelles investigations sur les proches de Thomson soient menées aux USA pour établir un "profil de vie" solide de Iqbal al-Hilli. On ne sait pas à ce jour si elles ont été lancées. Le mystère de Chevaline, lui, reste entier.
