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"Je voudrais juste sortir la tête de l'eau" : immersion au cœur d'une audience de surendettement

REPORTAGE - Les dossiers de surendettement à la Banque de France ont augmenté de 8% en 2023, selon une information RTL. Pour ceux qui n'arrivent pas à respecter l'échéancier, la justice reste la dernière bouée de sauvetage. Reportage au tribunal judiciaire de Nantes.

Deux matinées par mois, la magistrate reçoit des hommes et des femmes qui ne s'en sortent pas;
Crédit : Cindy Hubert
Au coeur d'une audience de surendettement
00:03:15
Cindy Hubert
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Nous sommes dans une salle immense aux murs rouges. Les familles oublient vite le protocole, elles s'avancent bien au-delà de la barre, à quelques centimètres du visage la juge, et elles chuchotent. 


Car c'est toute leur vie qu'on dissèque, de manière très impudique. Cécile Hénoux est vice-présidente au tribunal judiciaire de Nantes, elle est en charge -seule- de tous les dossiers de surendettement de la juridiction. Deux matinées par mois où la magistrate reçoit des hommes et des femmes, qui ont déjà vu la Banque de France, mais qui n'arrivent pas à respecter l'échéancier, ou bien le contestent. 

La juge sort une grosse calculette en plastique, et elle épluche les comptes bancaires : "Vous faites vos courses chez Lidl ? Est-ce que vous pouvez vous passer de voiture ?" 

J'ai honte de ne pas m'en sortir.

Il ne s'agit pas de faire la morale, mais de trouver des solutions. En face d'elle, Michel pleure de honte. Honte de ne pas s'en sortir, depuis qu'il a été licencié d'un magasin de bricolage. Il a 6 crédits de consommation sur le dos. Le père de famille doit rembourser 300 euros tous les mois, mais il n'y arrive pas. 

"C'est vrai que cela peut amener à beaucoup d'émotion à l'audience", confirme la magistrate. "Souvent, les personnes ont fait face à des accidents de vie pour en arriver à être surendettées. Et on voit tout à travers les relevés de comptes. Comment est-ce que mangent les personnes ? Où est-ce qu'elles vont ? Quels sont leurs loisirs ? Par le biais de virements, donc c'est très intrusif."

"Le surendettement, cela peut arriver à tout le monde"

Les personnes qui défilent à la barre ne sont pas des flambeurs. Le surendettement, cela peut arriver à tout le monde, souligne la juge : "Cela peut arriver à tout le monde de perdre son travail et dans ces cas-là, cela vient très vite, parce qu'il va y avoir aussi par exemple un accident de voiture et donc, il va falloir emprunter pour réparer la voiture, puis réemprunter parce qu'il va falloir rembourser le premier crédit qu'on n'arrive pas à rembourser.

Et il y en a beaucoup qui sont dans cette spirale de crédits à la consommation. Ce ne sont pas des personnes qui ont volontairement vécu au-dessus de leurs moyens, pendant des années, en se disant advienne que pourra, dans quelques années, je déposerai un dossier à la Banque de France pour que l'on efface mes dettes, ce n'est pas ça le cheminement, ce sont souvent des situations dramatiques et précaires."

Est-il possible alors d'effacer des dettes purement et simplement ? Oui, mais à deux conditions. La première, c'est que la personne ne puisse plus rien payer "ne serait-ce que 50 euros pas mois, il faut qu'il n'y ait aucune capacité de remboursement", précise la juge. "La deuxième condition, c'est qu'il y ait une situation irrémédiablement compromise. Donc, une personne qui a 25 ans, qui est au chômage, je ne vais pas lui effacer ses dettes, on peut espérer qu'elle retrouve un travail, et je vais lui faire un gel des créances."

La justice est ici une "main tendue"

Un gel des créances permet à la personne d'arrêter de rembourser pendant deux ans, pas d'intérêt, pas de frais. Puis, on refait le point. Mais ce gel des dettes n'est possible qu'une fois. 


La juge peut enfin rééchelonner les créances. Mais les plans ne peuvent pas aller au-delà de 7 ans. Nadine a 47 mois par exemple pour éponger ses dettes. Mais après un accident de voiture et un arrêt-maladie, cette préparatrice en pharmacie est venue "demander du répit", d'étaler ses créances quasiment au maximum, sur 75 mois. La loi est là pour aider, "c'est une main tendue" : il faut que les personnes aient encore de quoi vivre, même très justement. Aujourd'hui, la justice n'envoie plus les gens en prison à cause de leurs dettes, ça s'appelait la "contrainte par corps", mais cela a été aboli depuis bien longtemps, au XIXe siècle.

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