Ingrid Caeckert : l'assassin aux œillets mauves

Samedi 16 mars 1991, une locataire du sixième étage de la résidence Neptunus, un immeuble moderne qui se dresse sur le front de mer de la station balnéaire de Knokke-Heist, en Belgique, est attirée par des bruits qui semble provenir de la cage d'escalier. Elle ne fait que quelque pas. Sur les marches, entre le sixième et septième étage, il y a un corps. Celui d'une jeune femme blonde qui git dans une mare de sang. Il s'agit d'Ingrid Caeckaert, 26 ans, une agent immobilier spécialisée dans les biens de luxe qui tient sa propre agence. Elle occupe un appartement du septième étage avec son fiancé, absent au moment du drame. 

Sur le corps de la malheureuse, les légistes dénombrent 62 coups de couteau et évoquent un "acharnement forcené". Au regard des traces au sol, l'agression a démarré quand la victime est sortie de l'ascenseur, sur le palier du septième étage. L'homme l'attendait devant chez elle. Il s'est blessé lors de l'attaque. 

"C'est en plein jour, à la mer, il y a beaucoup de gens dehors et dans l'immeuble. C'est étrange que personne n'ait vu l'auteur couvert de sang, indique Cedric Lagast, journaliste pour le quotidien belge Het Nieuwsblad et présentateur du podcast "Les votes d’assises", disponible en Néerlandais, dont un épisode revient sur le meurtre d’Ingrid Caeckaert. Il laisse une trace de sa main, avec le sang, sur la porte du bâtiment. On sait qu'il a marché dans les rues de Knokke-Heist. On retrouve une autre trace à 72 mètres, là où on pense qu'il est monté dans sa voiture." 

Elle pensait que ce genre de fleurs était destiné aux morts et au cimetière

Marie-Josèphe Caeckert

Les enquêteurs, à la recherche du moindre détail, entendent à plusieurs reprises les parents, le fiancé, et les amis proches d'Ingrid Caeckaert. Une curieuse histoire leur est rapportée. Un mois avant le crime, le jour de la Saint-Valentin, la jeune femme a reçu une carte d'un admirateur anonyme. Dans les jours qui ont suivi, elle a été destinataire d'une nouvelle carte sentimentale. Cette fois, l'amoureux l'a déposée dans le coffre de sa voiture. 

Quelques jours avant l'assassinat, Ingrid reçoit à l'agence immobilière un gros bouquet d'œillets mauves et violets. L'expéditeur est anonyme. "Ingrid détestait les œillets et n'aimait pas cette couleur. Elle pensait que ce genre de fleurs était destiné aux morts et au cimetière", indique sa mère, Marie-Josèphe. Ingrid Caeckert aurait donc vu à travers ces œillets un mauvais présage. "Ce n'était pas qu'à l'agence immobilière. C'est aussi après sa mort, sur sa tombe au cimetière, qu'on trouve de nouveau ces fleurs. C'est un mystère", relate Kurt Wertelaers, ancien chroniqueur judiciaire qui a fondé le premier "bureau des cold cases de Belgique" : le bureau Van Meerbeeck. 

Les policiers n'ont pas de mal à retrouver l'expéditeur de la carte de la Saint-Valentin. C'est un pharmacien marié qui épiait la jeune femme chez elle depuis une terrasse voisine. Il déclare qu'il était secrètement épris d'Ingrid. Mais le jour du crime, il était très loin de Knokke-Heist. Et il n'a pas envoyé les fleurs. Aucun fleuriste de la région, ne vend ces œillets violets.

Une mystérieuse lettre

Deux semaines après le meurtre, une enveloppe est déposée dans la boite aux lettres de la police de Maldegem, la ville où vivent les parents de la victime. Elle est adressée à un certain commissaire Bob Seynhaeve. Ce dernier est inconnu au commissariat. Mais un policier de ce nom est bien résident de la commune. La lettre dit: "J'ai tué Ingrid Caeckeart par amour, pour la passion. Je la connaissais très bien". Le mot est curieusement écrit en lettres capitales, mais surtout en français, une langue pas spontanément utilisée dans cette région flamande. Les ADN se trouvant sur la lettre sont expertisés, ils ne correspondent pas à celui du meurtrier.

Mercredi 16 mars 2022, la justice belge classe sans suite le dossier Ingrid Caeckart. Sept mois plus tard, les parents de la jeune femme lancent un appel surprenant sur la chaîne VTM News : ils demandent à tous les hommes qui résident en Belgique, et même au-delà, de donner leur ADN pour essayer de trouver une correspondance entre ces échantillons et l'ADN du meurtrier. 750 hommes se manifestent. 

Lundi 27 mai 2024, les journaux annoncent qu'un premier portrait-robot génétique de l'assassin d'Ingrid Caeckaert a été réalisé. Les experts ont établi que le suspect est un homme originaire d'Europe de l'Ouest, âgé d'environ quarante ans. Georges et Marie-Josèphe Caeckaert, les parents de la victime, attendent toujours une bonne nouvelle. Ingrid Caeckaert repose au cimetière de Maldegem, la petite ville où elle avait grandi.

Les invités de "L'Heure du crime"

- Kurt Wertelaers, ancien chroniqueur judiciaire, il a fondé le premier « bureau des cold cases de Belgique » : le bureau Van Meerbeeck. 
- Cedric Lagast, journaliste pour le quotidien belge Het Nieuwsblad, présentateur du podcast « Les votes d’assises » disponible en Néerlandais dont un épisode revient sur le meurtre d’Ingrid Caeckaert.

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