Crise en Ukraine : bombardements, familles séparées, mobilisation... le point sur place

Le scénario du pire est en train de s'écrire à la frontière entre l'Ukraine et la Russie. Alors que Washington est catégorique depuis 48h : Moscou peut attaquer son voisin à tout moment, Emmanuel Macron va s'entretenir avec Vladimir Poutine à 11h ce dimanche dans ce qui ressemble au coup de fil de la dernière chance. Par ailleurs plusieurs pays dont la France ont invité leur ressortissants en Ukraine à quitter le pays. 

À Stanytsia Louganska dans le Donbass, les habitants vivent sous les obus, ils courent dans les rues, se cachent derrière les abris et une école a déjà été touchée. La population, déjà usée par 8 ans de guerre, est sous la menace d'une invasion russe. Du côté russe, au poste frontière, les gens sont bloqués depuis plusieurs jours, les séparatistes refusent de les laisser passer et de longues files de voitures sont visibles. Plus de 20.000 personnes ont déjà été évacuées de Donetsk pour la Russie, selon les autorités pro-russes.

Plus que jamais, les familles séparées par la guerre sont très inquiètes. Pour l'instant, l'unique point de passage à proximité de la ville séparatiste de Louhansk reste ouvert. Devant les grillages gardés par les militaires, Antolina attend que son fils de 4 ans traverse, il a passé quelques jours de vacances chez sa grand-mère : "Je viens plus tôt que prévu pour le chercher, ce n'est pas la première fois que je traverse, je n'ai pas peur de ces explosions", dit-elle. 

Antolina parvient à appeler sa mère se trouvant de l'autre côté : "Pour l'instant, c'est plutôt calme dans la ville, les transports fonctionnent. Bien sûr que je suis inquiète car j'entends des coups de feu, mais nous sommes habitués depuis la guerre de 2014. Il n'y a pas de panique, les distributeurs fonctionnent, mais les gens retirent de l'argent car la situation n'est pas claire", explique-t-elle au bout du fil. Voilà le quotidien de nombreuses familles dans le Donbass, séparées parfois de quelques centaines de mètres.  

Une guerre de communication entre les deux camps

Depuis la Russie, nous avons réussi a joindre Julia, qui se trouve dans un village à 50 kms de Donetsk : "J'ai peur de ce qui va se passer. Nous sommes à l'intermédiaire entre l'Ukraine et la Russie. Mais ici, c'est ma maison, j'ai mon fils de 25 ans, il ne peut pas quitter la région avec la mobilisation, je ne peux pas partir sans lui", confie-t-elle. 

De chaque côté, ce sont des civiles qui sont souvent visés. Parfois, des obus tirés à l'aveugle traversent les murs des maisons et terminent dans les cours des jardins. Dans un petit village ukrainien où nous avons trouvé un adolescent, les vitres d'une école sont soufflées par l'explosion d'un obus qui a atterri tout droit sur le terrain de sport.

Evidemment, à chaque tir d'obus, l'armée ukrainienne accuse les séparatistes d'être à l'origine de ces attaques, ce qui fait encore monter les tensions. En Russie, c'est tout l'inverse, les séparatistes accusent l'Ukraine d'agression. La presse a même publié la photo d'un obus ukrainien qui est tombé sur le territoire russe. 

Cette guerre de communication se joue aussi dans l'accueil de la population puisque Moscou propose 10.000 roubles à chaque famille qui vient se réfugier en Russie. La guerre de l'information, c'est aussi ces supposées attaques chimiques ou actes terroristes dont sont soupçonnés les Ukrainiens par l'État russe. 

Une mobilisation de tous les hommes pour combattre

Ces dernières 24h, les observateurs internationaux présents sur place le long de ces 427 kms de ligne de front, ont enregistré plus de 1.500 violations de la trêve dans les deux camps. Un niveau jamais atteint depuis juillet 2020. Chaque nouvel incident augmente les chances d'un embrasement de la région. 

"C'est une violation manifeste du cessez le feu, de tous les accords de paix et de toutes les normes du droit humanitaire. Ces derniers jours, nous avons noté une grande escalade et il y a des craintes que cela continue. C'est là que les opérations offensives sur des territoires contrôlés par l'Ukraine peuvent débuter", détaille un gérant d'une organisation d'aide aux réfugiés. 

Ce que redoutent une partie des habitants, c'est que Moscou se serve d'une détérioration de la situation comme prétexte pour soutenir les combattants pro-russes et pourquoi pas intervenir plus loin en Ukraine. Dans le Donbass, les hommes de 18 à 65 ans ont interdiction de quitter la zone pour pouvoir combattre, parfois de force. Un ancien militaire de 51 ans nous a confié que l'armée séparatiste est venue le chercher chez lui. Il ne sait pas s'il sera sur le terrain ou dans le commandement mais il a négocié avec eux de pouvoir passer une dernière nuit en famille. Un autre contact nous a envoyé des images d'adieux déchirants de famille. 

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