L’Europe n’importera plus de carburant diesel de Russie à compter
d’aujourd’hui. C’est en effet une nouvelle étape dans les
sanctions européennes à l’encontre de la Russie : les 27 ne lui achèteront plus
de produits pétroliers raffinés.
C’était l’un de nos principaux fournisseurs
avant la guerre. Et en particulier d’un carburant très utilisé en France, le
gazole, qui fait rouler 55% du parc chez nous. La France était, avant le
conflit, le premier importateur européen de gazole, juste devant l’Allemagne,
car nous avions réduit nos capacités de raffinage dans les dernières
années. Mais tout au long de l’année 2022, nous avons diversifié nos fournisseurs,
en faisant venir le carburant par exemple de raffineries saoudiennes, ou des
États-Unis. Toute l’Europe a mis en place de nouveaux circuits
d’approvisionnements.
Les quantités requises ont été trouvées, parfois au prix de contorsions dérangeantes.
La Lettonie, l’un des états baltes, en Europe du Nord, a fait venir récemment
un tanker chargé de carburant importé chinois. Comme on le sait, la Chine ne
produit pas de pétrole sur son sol. Elle a donc probablement importé du pétrole
russe, l’a raffiné, et l’a réexporté en Lettonie, alors que ce pays a deux
cents kilomètres de frontières communes avec la Russie ! Inutile de dire qu’en
plus, le bilan carbone de l’opération n’est pas top, un aller-retour avec la
Chine, 15 000 kilomètres et 45 jours de bateau… C’est possiblement les mêmes
combines avec le carburant qui arrive d’Inde, voire d’Arabie saoudite. Les
Saoudiens achètent en effet le pétrole russe à prix cassé pour revendre au prix
fort le produit raffiné.
Selon les fournisseurs, aucune pénurie de Diesel n'est à prévoir en France. C’est vrai qu’en janvier 23, il y a un mois, nous avions déjà très fortement réduit les importations de Russie, dans la perspective de l’embargo, et que le diesel ne manquait pas à la pompe. Mais le prix restera sous pression inflationniste, à cause des coûts de transports qui se sont évidemment accrus. Et les nouvelles filières d’approvisionnement ne sont pas encore stabilisées, elles sont soumises aux aléas du marché et exposées à des risques qui progressent avec la distance.
Ces sanctions contre la Russie ne sont pas efficaces. Elles ont une efficacité relative, ayant probablement fait perdre
quelques points de croissance, mais dans un pays où les chiffres officiels
n’ont pas grand sens, car une bonne part de l’activité est au noir. Quant aux
recettes d’exportation de la Russie en Europe, elles ont plutôt progressé en
2022, car l’envolée des cours a largement compensé la chute des volumes. C’est
regrettable. Mais on ne peut pas dire pour autant que ces sanctions sont
inutiles. Car durant cette année 2022, l’Europe a considérablement réduit sa
dépendance aux hydrocarbures russes, de l’ordre de 90%. Elle a donc privé
Poutine d’un levier stratégique très important.
Mais pour autant, Poutine ne manque pas de client. L’or noir russe
part en Chine bien sûr, en Inde, au Brésil, souvent discompté. Mais il va
aussi, avec ses sous-produits, en Afrique du Nord, au Maroc par exemple et en
Tunisie. Il ne faut pas oublier que les deux tiers des habitants de la planète
vivent dans un pays qui n’a pas condamné l’invasion de l’Ukraine.
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