Baccarat : les derniers salariés de la cristallerie s'inquiètent
ÉDITO - La cristallerie Baccarat, fleuron du luxe français, attend depuis des mois la reprise de l'entreprise par une mystérieuse femme d'affaires chinoise. Un retard qui inquiète les salariés.

Elle s'appelle Coco Chen. C'est presque Coco Chanel. Et c'est peut-être aussi un mirage, un miroir sans teint. Cette femme est une grande collectionneuse. Il y a six mois, elle a lancé un raid sur Baccarat et promis de prendre 88,6% de la société pour 164 millions d'euros.
Elle rachetait l'entreprise à un fonds d'investissement américain. Car il y a bien longtemps que Baccarat vend du rêve français en étant dans les mains de groupes étrangers. Les Taittinger ont cédé leurs parts dans Baccarat en 2005.
Aujourd'hui, Coco Chen est censée investir plusieurs millions dans l'usine pour ouvrir les portes de l'Asie à la marque qui est encore peu présente. Mais les autorités chinoises ne donnent pas leur aval à un tel achat.
Ce qui paraît fou, c'est que Baccarat ne soit pas restée entre des mains françaises. D'ailleurs, c'est un des paradoxes de cette histoire. Le luxe à la française est un des secteurs où nous comptons des géants mondiaux - LVMH, Kering (le groupe de François Pinault). Le luxe tricolore est un poids-lourd de nos exportations. Il se porte très bien. Mais malheur à ceux qui ne font pas partie des écuries Arnault ou Pinault. Sinon c'est plus chaotique, à l'image de Baccarat.
On est pourtant au firmament de ce que le "made in France" fait de plus beau : des verres, des miroirs, des lustres, des bijoux. Aujourd'hui, il y a 500 salariés qui s'inquiètent pour leur avenir. Pourtant, la société ne perd pas d'argent.
Faire le tri chez les milliardaires chinois
Ne peut-on donc pas faire confiance à un investisseur chinois ? C'est plus complexe que ça. Il y a un goût évident des investisseurs chinois pour le luxe français, on le sait. Il y a aussi une classe émergente fortunée en Chine capable d'acheter du luxe. Dons avoir un propriétaire chinois quand on est un groupe français du luxe n'est pas aberrant.
Mais il est encore un peu difficile de faire le tri parmi ces milliardaires chinois. Il y a des fonds reconnus comme Fosun, qui a investi dans le Club Med et Accor notamment, mais aussi Dongfeng, qui est actionnaire de Renault et de Peugeot-Citroën. Ces fonds-là sont solides, organisés et fonctionnent suivant des normes internationales.
Et puis vous avez des milliardaires individuels dont la fortune s'est faite en moins de vingt ans et qui restent encore à la merci des autorités chinoises. Ceux-là sont fragiles. On se souvient de l'investisseur qui avait gagné l’aéroport de Toulouse et qui a été mystérieusement porté disparu quelques mois plus tard. L'économie chinoise génère en moyenne un nouveau milliardaire par semaine. Tous ne sont pas de fins investisseurs.
Les cristaux peut-être pas éternels
Quand on lit l'histoire de la maison Baccarat, on se dit qu'elle n'a jamais cessé de passer de mains en mains en 250 ans. Il y a eu des familles qui se sont transmises la cristallerie entre le XIXe et le XXe siècle, mais il y a eu beaucoup de faillites aussi.
Les diamants sont éternels, mais peut-être pas les cristaux. C'est la crainte des salariés aujourd'hui qui attendent une réunion du conseil d'administration à la fin juin pour savoir si Coco Chen viendra. Ou si les employés de Baccarat devront attendre des lustres.
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Nestlé, propriétaire de Nespresso et Nescafé, vient d’annoncer qu’il rachetait Starbucks pour un peu plus de 7 milliards de dollars (6 milliards d'euros). Cela fait quelques capsules. L'objectif pour le géant suisse : s'ouvrir le marché américain du café où il est encore très absent.
La note du jour
17/20 au Concours Lépine, dont l'édition 2018 a eu lieu lundi 7 mai. Une 117e édition avec 583 inventions présentées. N’oublions jamais que le stylo bille, le mouchoir en papier, le moulin à légumes ou l'aspivenin sont nés là. Ces objets n'ont pas tous faits la fortune de leurs inventeurs, mais ils ont changé notre quotidien et représentent encore de gros enjeux économiques.