Des élus franciliens bravent le froid glacial pour alerter sur le sort des sans-abris. "J'ai un tapis de sol, deux sacs de couchage et une couverture", énumère Anne Lebreton, alors que des flocons s'écrasent sur sa doudoune. Comme une trentaine de députés, cette adjointe au maire du 4e arrondissement de la capitale s’apprête à passer la nuit dans la rue.
"Oui, il va faire froid cette nuit, mais nos vies à nous ne sont pas plus importantes que celles des SDF", martèle Mama Sy mercredi 28 février dans la soirée. La jeune élue (sans étiquette) d'Étampes (Essonne), est à l'origine de l'appel aux élus de tous les bords politiques à dormir dehors aux côtés des sans-abri de la capitale. Autour d'elle, au point de rendez-vous sur un quai de la gare d'Austerlitz, ils sont une trentaine d'élus locaux d'Île-de-France, écharpe tricolore en bandoulière, à taper de la semelle pour se réchauffer.
Par cette initiative, Mama Sy entend "alerter" aussi bien l'opinion publique que les responsables politiques sur les sans-abri. Et de rappeler que "20 personnes sans domicile fixe sont mortes en Île-de-France depuis début janvier". À Paris, au moins 3.000 sans-abri ont été comptabilisés la nuit lors d'un récent recensement organisé par la mairie.
Face aux températures glaciales, le plan Grand Froid pour l'hébergement des sans-abri a été décrété et plus de 1.900 de places supplémentaires ont été créées à Paris. "Il faut des solutions pérennes, je pense par exemple à la réquisition de bâtiments publics vides", explique Mama Sy. Le thermomètre affiche -2 degrés, la neige qui a fortement perturbé les trafics routier et aérien dans le sud du pays dans la matinée est remontée jusque sur les bords de Seine.
Arrêtez de filmer ! arrêtez votre cirque !
Un SDF qui s'adresse aux journalistes
Entre les crissements de frein d'un train en provenance d'Orléans et le fracas des travaux de rénovation, le petit groupe et la nuée de journalistes sortent de la gare d'Austerlitz et se dirigent vers le Jardin des Plantes. Une poignée d'élus tentent de glisser quelques mots de réconfort à un SDF emmitouflé sous plusieurs couvertures dans la rue Buffon. L'homme, visiblement excédé par la présence des journalistes et des caméras, leur lance : "Arrêtez de filmer ! Arrêtez votre cirque !" avant de jeter une salière dans leur direction.
Au plan politique, l'action ne fait pas l'unanimité. "La responsabilité d'un élu de la République n'est pas d'aller dormir dans la rue pour faire 'plus vrai', mais de trouver des solutions pour sortir ceux qui y sont", a réagi le groupe PPCI (Parisiens Progressistes, Constructifs et Indépendants, pro-Macron ex-LR) du Conseil de Paris.
Pas dépitée, Anne Lebreton, l'élue (LREM) du 4e arrondissement, assume de prendre le problème des sans-abri "à bras-le-corps". Quant au "buzz médiatique, c'est très important. Regardez ce que l'Abbé Pierre a accompli grâce au buzz médiatique", lance-t-elle. Un peu plus loin, Abdelsalem Hitache, élu municipal (Modem) au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), a déroulé son duvet.
À ses côtés, Philippe, membre de l'association "Un cœur, un toit" qui a passé dix ans dans la rue, lui raconte "le froid, les agressions et puis les rats". "Pour nous, la rue c'est le temps d'une nuit, pour (les SDF) c'est le temps d'une vie, de 20 ans, de 10 ans", soupire l'élu.
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