Selon le nouveau calendrier d’EDF, le dernier de ces six réacteurs serait démantelé en 2100, voire en 2115. Dans cent ans ! Jusqu'alors EDF promettait de les démanteler d’ici 2045. Donc, ça ferait au moins cinquante ans de retard. Nous parlons là de la première génération de réacteurs, dite au "graphite-gaz", qui sont les plus difficiles à déconstruire. Pour les générations suivantes, les démantèlements devraient mieux se passer.
Ces six réacteurs ont été mis en service dans les années 60-70 sur trois sites : le Bugey, Chinon et Saint-Laurent-des-Eaux. Les ingénieurs d’EDF comptaient découper les réacteurs en les immergeant, en utilisant la protection de l’eau pour amortir les rayonnements. "On pensait lever les verrous techniques qui restaient, mais on s’est rendu compte que c’était trop difficile", nous a expliqué Sylvain Granger, le patron du démantèlement à EDF. L'entreprise veut changer de technique. "Nous n’allons pas déconstruire les réacteurs dans l'eau, mais dans l’air", révèle Sylvain Granger. Cela se ferait à l’aide de robots.
C’est plus cher, et surtout ça prendra beaucoup plus de temps. Pour ces six réacteurs-là c’est un "changement de doctrine", car EDF jusqu'alors le disait partout : "La stratégie d'EDF c'est de démanteler sans attendre, ne pas laisser le soin aux générations futures de réaliser le démantèlement de centrales qui ont cessé de fonctionner". Ce message - entendu dans un documentaire d’Arte il y a deux ans - a été martelé par EDF. Du coup, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) refuse en l’état le nouveau calendrier d’EDF.
"Nous pouvons comprendre les difficultés techniques, mais étaler jusqu'au XXIIème siècle est inacceptable", réplique sur RTL Jean-Luc Lachaume, directeur adjoint de l'ASN en charge du démantèlement. "Au XXIIème siècle, moi je ne serai plus là. Il serait extrêmement présomptueux de dire qu'EDF existera encore au XXIIème siècle", martèle-t-il. "Si vous regardez un siècle en arrière, on était en 1916 au moment de la bataille de Verdun. Il serait hasardeux de se projeter dans un siècle et dire 'on fera ci, on fera ça !' Quand on a des échéances lointaines, elles sont rarement tenues", poursuit-il.
"Au plan de la sûreté nucléaire, il est impossible de prouver qu'une installation à l'arrêt depuis les années 1980 aurait des éléments qui seraient encore debout, contenant de la radioactivité en 2110. Ça ne nous parait clairement pas acceptable", assène encore Jean-Luc Lachaume. "Inacceptable" : le gendarme du nucléaire franç