"Notre société doit se reconstruire avec les plus fragiles au centre", ambitionne l'entrepreneur Laurent de Chérisey

François Hollande recevra mardi 22 décembre les lauréats de "La France s'engage", un label présidentiel qui met en valeur des projets innovants et solidaires. L'idée du chef de l'État est de promouvoir des initiatives citoyennes, locales, mettant en scène des jeunes, des habitants des quartiers. Parmi les lauréats, on retrouve des associations pour lutter contre le réchauffement climatique, contre l'insécurité alimentaire, le mal logement, le décrochage scolaire, l'exclusion et l'accompagnement des personnes en situation de handicap. Une thématique sur laquelle travaille Laurent de Chérisey, fondateur et directeur général de la Fédération Simon de Cyrène. Cette association propose de faire vivre ensemble, sous le même toit, des personnes en situation de handicap et des personnes valides.

Laurent de Chérisey l'a créée à la suite d'un drame familial. "Le monde du handicap, c'est souvent les familles qui s'y collent. On plonge dans une réalité le jour où l'on prend le coup de fil. On apprend que quelqu'un de très proche a eu un accident de voiture ou un accident vasculaire cérébral. Tout bascule, ça devient une lutte énorme et les personnes se retrouvent huit mois après avec des traumatismes crâniens. Chaque année en France, c'est 40.000 personnes."

On a toujours une part de nous qui rêve de retrouver la personne d'avant

Laurent de Chérisey, fondateur et directeur général de la Fédération Simon de Cyrène

SLe constat établi, la famille se mobilise autour de la personne handicapée. "C'est du temps long le handicap, ça prend des années. On a toujours une part de nous qui rêve de retrouver la personne d'avant. Des années plus tard, on se demande comment faire pour que la vie retrouve sens".

C'est l'objectif vers lequel la Fédération Simon de Cyrène veut tendre. "Ce sont des personnes qui ont été jusqu'à 18 ou 40 ans Monsieur et Madame Tout le monde. Grâce aux progrès de la médecine d'urgence et à l'implantation des Samu que ces gens restent en vie. Quand elles se réveillent dans une société qui nous dit grosso modo "il faut être efficace et rentable sinon tu sors du jeu", ces personnes se demandent pourquoi elles sont en vie. La réponse vient d'elles-mêmes. La vie, c'est aussi le goût de l'autre. La personne handicapée est dans une situation de dépendance qui l'amène à dire à l'autre "j'ai besoin de toi". Dans cette phrase, la personne handicapée me révèle que moi aussi je suis capable d'entrer en relation, je suis capable d'amitié et de fraternité."

Le handicap désocialise

Laurent de Chérisey, fondateur et directeur général de la Fédération Simon de Cyrène

Les personnes diminuées ont-elles besoin de vaincre une certaine forme de solitude ? "Le handicap désocialise. Toute forme de dépendance désocialise. Notre société doit se reconstruire avec, au cœur, les plus fragiles qui invitent à la relation, à dépasser la peur de l'autre ce qui est essentiel aujourd'hui. Ça déclenche un goût de vivre, une relation qui fait du bien."

L'association a aussi vocation à participer à la vie économique du pays. Elle intègre dans le cadre du service civique volontaire des  jeunes de 18 à 25 ans qui perçoivent 500 euros par mois de l'État. "Ils s'engagent comme citoyens acteurs de la société chacun dans ses désirs, chacun dans ses projets. Je rêve qu'il y ait des jeunes dans toutes les maisons de retraite et les maisons pour handicapées. Dans notre domaine, il y a des jeunes qui disent, après un an d'expérience, "je suis heureux". C'est une vie qui a du sens. Il y a à peu près la moitié des jeunes qui veulent prolonger, se former et que nous allons embaucher parce qu'aujourd'hui on développe des Maisons Simon de Cyrène dans une dizaine de villes en France."