"Aujourd'hui, Monsieur le Président, nous sommes sous le choc". Dans une lettre adressée à Emmanuel Macron, près de 250 personnalités se mobilisent contre un article du projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles, examiné ce lundi 14 mai et mardi 15 mai en première lecture à l'Assemblée nationale.
"Votre gouvernement souhaite faire évoluer la loi sur les violences sexuelles et permettre que le viol d'un enfant, un crime, soit jugé comme un délit", écrivent les signataires de cet appel, dont l'ancienne ministre Yvette Roudy, l'actrice Karin Viard et des dizaines de responsables d'associations et de militantes féministes.
Dans cet appel à l'initiative du Groupe F, mouvement féministe fondé notamment par Caroline de Haas, les associations de défense des droits des femmes s'inquiètent de l'article 2 du projet de loi. Elles le jugent peu protecteur pour les enfants victimes de viol.
Cet article prévoit de "renforcer la répression des infractions sexuelles sur mineurs". Il est très attendu après deux affaires, dont l'une au tribunal de Pontoise, où des fillettes de 11 ans avaient été considérées comme consentantes par la justice. "Nous sommes inquiets, nous ne voulons pas d'un autre Pontoise", déclarent les signataires. Selon eux, le texte "fait l'inverse" et ouvre "la porte à une correctionnalisation massive des viols des mineurs".
Elles protestent en diffusant le hashtag #LeViolEstUnCrime sur Twitter et en lançant une pétition. "En créant un nouveau délit, celui "d'atteinte sexuelle sur mineur.e.s par pénétration", puni de 10 ans de prison, la loi facilitera le renvoi vers le tribunal correctionnel des affaires de viols sur mineur.e.s", expliquent les 250 personnalités.
Dans leur lettre au président de la République, elles demandent de "supprimer cet article du projet de loi", car "il minimise la gravité du viol, il ouvre la voie à une déqualification massive des viols de mineur.e.s, il met en danger les enfants".
Votre gouvernement souhaite faire évoluer la loi sur les violences sexuelles et permettre que le viol d'un enfant, un crime, soit jugé comme un délit
Les signataires de la lettre ouverte adressée à Emmanuel Macron
Le projet de loi, porté par la secrétaire d'État à égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, entend faciliter les condamnations pour viol sur mineur en prévoyant que "lorsque les faits sont commis sur un mineur de quinze ans", les notions de contrainte et de surprise peuvent "être caractérisées par l'abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes".
Pour les cas où le viol ne pourrait être établi, il aggrave les peines pour l'atteinte sexuelle (délit qui réprime tout acte sexuel entre un mineur de moins de 15 ans et un majeur) : sept ans contre cinq actuellement, et dix ans lorsqu'il y a pénétration, une distinction qui n'existait pas auparavant.
Face à la polémique et durant le débat consacré à ce projet de loi, organisé à l'Assemblé nationale ce lundi 14, Marlène Schiappa a défendu ses engagements. L'article qui pose problème aux opposants et opposantes "sera ajouté à l’alinéa 1 de l'article du Code Pénal 222-22-1 qui définit le viol et qui précise la définition du viol", explique la secrétaire d'État dans une vidéo publiée sur son compte Twitter.
"Cet article dit que lorsque les faits sont commis sur la personne d'un mineur de 15 ans, la contrainte morale ou la surprise sont caractérisées par l'abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes", martèle Marlène Schiappa.
Nicole Belloubet, ministre de la Justice qui porte elle aussi ce projet de loi, a quant-à elle affirmé sur le réseau social que le gouvernement souhaiter "lutter contre la correctionnalisation en facilitant les poursuites pour viol", écrit-elle avant d'ajouter : "Il le fait dans ce projet de loi, il le fait dans le projet de loi de programmation et réforme de la justice en prévoyant l’expérimentation d’un tribunal criminel".
Sur les réseaux sociaux, les élus comme les militantes ou militants continuent pourtant de s'écharper. Fatima El Ouasdi, présidente de l'association Politiqu'Elles juge de son côté que l'article 2 a mal été interprété par ses détracteurs et détracteuses :
"Désormais, le code pénal inscrit CLAIREMENT l'interdit des relations sexuelles entre un majeur et un mineur de 15 ans. Ce n'était pas le cas avant", résume la militante.
C'est également le point de vue de Maître Eolas, avocat interrogé par L'Obs à ce sujet. "Avec cet article, les rapports sexuels sur mineurs ne deviennent pas légaux. Ils restent un délit, comme ils le sont déjà. La loi durcit, non l'inverse", explique-t-il dans cet entretien. Selon lui, "avec l’article 2, les peines encourues et les indemnités obtenues deviennent presque les mêmes en correctionnelle qu’en cour d’assises. Pour certaines victimes, le choix d'accélérer le processus peut être libérateur".
Le débat est loin d'être terminé, le projet de loi doit encore être discuté ce mardi 15 mai à l'Assemblée.
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