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JR devant la Pyramide du Louvre
Crédit : ROMUALD MEIGNEUX/SIPA
"Artiste jusqu'à ce que je trouve un vrai travail", dit JR dans la biographie de son compte Twitter. Pourtant, le Français est très occupé. Depuis plusieurs années, il traverse la planète pour placarder des photographies géantes en noir et blanc. Il s'agit en général de portraits d'inconnus. Sa dernière œuvre ? Recouvrir la pyramide du Louvre de clichés correspondant au bâtiment du musée situé derrière, jusqu'à ce que la pyramide ait l'air de disparaître. Il a terminé ce projet fou le 25 mai.
JR a prévu d'autres surprises avec le musée du Louvre, dont il prend "possession" pendant 24 heures à partir du samedi 28 mai, 3 heures de l'après-midi. Au programme : projections, ateliers, spectacles de magie et conférences. Des célébrités seront aussi présentes, comme Cara Delevingne (mannequin et future star du nouveau film de Luc Besson), la réalisatrice Agnès Varda ou l'artiste Daniel Buren.
JR ne quitte jamais ses lunettes de soleil et son chapeau, et refuse de dévoiler son identité. Il a choisi ses initiales comme nom d'artiste. De lui, on sait seulement qu'il a grandi dans la banlieue Ouest parisienne, "dans une HLM de la classe moyenne". Né d'une mère tunisienne et d'un père d'origine européenne, il a fait ses classes au lycée Stanislas, à Paris.
"Dès l'âge de 12-13 ans, j'ai travaillé sur les marchés, à déballer et remballer les stands des vendeurs les plus âgés", raconte-t-il à Télérama en 2015. "Un jour, sur le quai de la ligne A, j'ai trouvé une sacoche avec un petit appareil photo, oublié par un touriste. Je me suis dit que ça serait bien de documenter ces lieux incroyables que je découvrais." JR fait un peu de graffiti, avant de se mettre vraiment à la photo.
À ce jour, il possède 2 ateliers, l'un à Paris et l'autre à New York. Une petite équipe de moins de 10 personnes l'entoure au quotidien, pouvant monter jusqu'à 20 pour les projets les plus ambitieux. JR finance son travail en partie par la vente de tirages, parfois jusqu'à 30.000 euros, et de pièces uniques pouvant s'arracher à 200.000 euros.
Ne cherchez pas les photographies de JR dans un musée ou une galerie. Tout juste a-t-il exposé une fois à la galerie d'Emmanuel Perrotin, dans le quartier du Marais, à Paris. Il faut se balader, aussi bien à New York qu'à Rio de Janeiro, et avoir les yeux bien ouverts. Le Français travaille principalement sur des portraits géants de personnes anonymes, imprimés en noir et blanc. Lui et son équipe les collent en général sur les façades d'immeubles résidentiels. La démarche de JR est d'imposer ses photographies aux yeux de tous. "La ville est un musée à ciel ouvert", estime l'artiste. Plus le temps passe, plus ses projets prennent de l'ampleur.
Avant son installation à la pyramide du Louvre, JR a beaucoup travaillé avec l'image du ballet, pour la moderniser. Il a marqué l'année 2015 en photographiant les danseurs de l'Opéra de Paris dans des box du port du Havre, pour le festival Terres d'Eaux. Il a également fait coller leurs portraits sur ces mêmes box, ainsi que le regard géant d'une Kényane, sur 7,5 kilomètres de bandes de papier d'un mètre de large.
L'installation "Walking New York" par JR
Crédit :
À New York, il a fait installer au sol un énorme portrait d'un homme immigré en train de marcher, faisant 50 mètres de haut. Ce projet, intitulé Walking New York, a été réalisé spécialement pour une couverture du New York Times Magazine, en avril 2015.
JR a aussi filmé des danseurs en pleine action au milieu de tours de Montfermeil. Cela a donné le court-métrage Les Bosquets, tiré d'un ballet du même nom qui s'inspire des émeutes de 2005. Le but de JR ? "Montrer comment le désir d’exister dans ces quartiers peut combattre la précarité et créer du beau où l’on ne l’attend plus." La musique a été réalisée par le Français Woodkid, ami de JR, et le célèbre compositeur de musique de films Hans Zimmer.
JR s'est fait connaître il y a 10 ans avec son premier projet, 28 Millimètres : Portrait d'une Génération, lui aussi inspiré des émeutes de 2005. Il s'agissait de portraits de jeunes habitant en banlieue parisienne. Il les a d'abord collés illégalement sur les murs de la Cité des Bosquets, puis à la Forestière, à Clichy-sous-Bois, dont il est originaire. "Ces images mettent au défi les passants, au sens où elles remettent en question la représentation sociale et médiatique d'une génération qui ne peut être vue qu'aux portes de Paris", peut-on lire sur le site de l'artiste. JR veut mettre en avant des visages que l'on n'a pas l'habitude de croiser.
JR a poussé jusqu'au bout sa démarche de mettre en avant des inconnus avec le projet Inside Out, démarré en 2011. L'artiste a ramené à Paris, au pied de la bibliothèque François Mitterrand, une cabine photo contenue dans une camionnette pour que des volontaires se fassent tirer le portrait, avant de le coller au sol. Il l'a aussi transportée à travers la France pour recueillir d'autres portraits, qui ont ensuite été placardés à l'intérieur et à l'extérieur du Panthéon. L'idée est simple : "transformer les messages personnels en œuvres d'art". JR s'est aussi rendu dans plusieurs villes du monde entier, de Tokyo à Toronto.
Vous l'aurez compris : JR est un artiste engagé. Mais il ne s'intéresse pas qu'aux problématiques sociales propres à la France. Globe-trotter dans l'âme, il parcourt en permanence la planète pour défendre différentes causes. En 2007, son projet Face 2 Face, réalisé avec l'entrepreneur et artiste Marc Berrebi, consistait à mettre côte à côte des portraits de Palestiniens et d'Israéliens, dans 8 villes autour d'Israël.
À la fin des années 2000, son projet Women Are Heroes l'a emmené au Brésil, au Cambodge, en Inde, au Kenya, au Liberia, en Sierra Leone et au Soudan pour afficher des photographies géantes de femmes issues de populations pauvres. Il en tire aussi un documentaire, et remporte le prestigieux Ted Prize.
L'art est un outil pour questionner le monde
JR
Pour JR, l'artiste a un rôle à jouer dans la société. "En me racontant leur histoire, elles me donnent une responsabilité énorme. À moi d'en faire quelque chose", raconte JR à propos des femmes qu'il a photographiées pour Women Are Heroes. Cependant, il se considère comme un artiste "engageant" et non pas "engagé" : "On me demande souvent des réponses. Mon rôle d’artiste ne se situe pas là : l’art est un outil pour questionner le monde", affirme-t-il sur le site du Musée du Louvre.
JR a la particularité d'être très proche d'un certain nombre de célébrités. Avec Robert De Niro, par exemple, il mène plusieurs projets artistiques à New York, dont le court-métrage Ellis, qui porte sur l'immigration. Le 25 mai, il invite Win Butler et Régine Chassagne, du groupe Arcade Fire, à donner un DJ set en plein Jardin des Tuileries, juste à côté du Musée du Louvre. Proche de la réalisatrice Agnès Varda, ils ont parcouru la France pour réaliser un documentaire.
JR a aussi réalisé une série de portraits de célébrités, où elles déchirent leur photo et apparaissent au centre. Sean Penn et les jumelles Ibeyi se sont prêtées au jeu. Il prend aussi des photos sur le tournage de certains films, comme Joy, avec Jennifer Lawrence.
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