C'est une trilogie invisible. Contrairement aux autres films de super-héros comme peuvent les concevoir Marvel ou DC Comics, le réalisateur M. Night Shyamalan a créé un triptyque secret. Le schéma classique d'une franchise inspirée par les comics et les super-héros serait de créer un premier film en forme d'"origin story".
Un film dans lequel un héros découvre ses pouvoirs et où le public prend connaissance des personnages et de l’univers en même temps que ce protagoniste. Si un tel film se révèle être un succès au box-office alors les producteurs et réalisateurs conviendraient d’offrir une suite ou deux (ou dix) à ce héros.
Pour sa trilogie, Night Shyamalan a choisi le frisson de la révélation finale pour lier ses œuvres. C'est seulement à la fin de Split sorti en 2017 que l'on comprend qu'il s'agit d'une suite de son blockbuster de 2000 avec Bruce Willis : Incassable. Il faut dire que les films ne partagent pas grand chose en terme de style : le premier est thriller et le second un film d'horreur psychologique. Incassable autorise ses personnages à se déplacer alors que Split est un huis clos anxiogène. Les 17 ans entre les deux sorties ont aussi participé à amplifier la surprise révélée dans l'ultime scène de Split.
Lors de celle-ci on peut voir quelques clients d'un "diner" américain. La télévision allumée raconte la fin de l'intrigue de Split et présente le concept de "Horde", un groupe de personnalités vivant à l’intérieur du personnage de James McAvoy. Une femme, interloquée par ce surnom original, demande alors si d'autres qu'elle se souviennent de "cet autre type qui avait un surnom bizarre il y a plusieurs années".
Un homme se détache, c'est David Dunn (Bruce Willis) qui répond : "Oui, M. Glass [l'antagoniste d'Incassable joué par Samuel L. Jackson]". Les deux films sont alors liés. Glass, au cinéma le 16 janvier 2019, se veut comme la fusion de ces deux premiers films, le point final d'une trilogie qui doit se centrer sur le personnage du fragile mais manipulateur Elijah Price, alias Mr. Glass.
C'est peut-être là le que le travail de mémoire sera le plus utile avant d'aller voir Glass. Il faut dire qu'Incassable est sorti il y a presque 20 ans et le public qui a aimé Split, film toujours très apprécié et téléchargé depuis sa sortie, pourrait bien être passé à côté de ce très bon thriller avec Bruce Willis, Samuel L. Jackson, Robin Wright, Spencer Treat Clark et Charlayne Woodard.
L'histoire d'Incassable est assez simple. Il s'agit d'un plan machiavélique composé par Elijah Price, misanthrope génial souffrant de la maladie des os de verre et obsédé par les comics. Son intellect et ses goûts le poussent à avoir la certitude que certains humains disposent de pouvoirs surnaturels.
Plutôt que de les chercher gentiment, il provoque diverses catastrophes afin de les démasquer. Il est notamment l'architecte de l'accident de train dont David Dunn (Bruce Willis) est le seul rescapé.
Le héros dispose de plusieurs pouvoirs, mais le film entretient le doute sur le caractère extraordinaire de ces compétences. David Dunn n'est jamais malade. Il n'est jamais blessé. Il dispose d'une force lui permettant de soulever des poids très lourds. Il est handicapé par une faiblesse : l'eau.
Certains personnages extérieurs comme le fils de David ou Elijah sont les témoins de ces pouvoirs. Les spectateurs, comme David Dunn, ont accès à l'autre pouvoir nettement moins conventionnel du héros : sa capacité à voir les crimes des gens qu'il touche. C'est grâce à ce don qu'il finit par découvrir la vérité sur le plan de Glass, une révélation qui mènera à l'arrestation et l'internement de l'homme.
Split évoque la vie très bousculée de Kevin Wendell Crumb. Cet homme souffre d'un trouble dissociatif de l'identité et est régulièrement suivi par l'une des pontes sur cette question : le Dr Fletcher. La psychiatre a pu, avec une grande patience et un grand sens du dévouement, identifier quelques 23 personnalités différentes.
L'un des succès du film repose d'ailleurs sur la performance d'acteur de l'écossais James McAvoy (le jeune professeur Xavier dans les derniers X-Men) qui doit alterner avec 23 voix, 23 postures, 23 histoires en permanence.
Split place Kevin Wendell Crumb dans le rôle du méchant principal. Il enlève des jeunes femmes afin de nourrir une 24ème personnalité qu'il nomme la Bête. Un personnage qui n'est pas sans rappeler un certain Légion dans les X-Men justement, le fils du professeur Xavier. Les connaisseurs de Marvel apprécieront ce clin d’œil.
En réalité, ce n'est pas le véritable Kevin qui contrôle son corps mais des personnalités plus solides : Dennis, un homme taiseux obsédé par la propreté, Patricia une femme élégante et autoritaire et Hedwig, un enfant de 9 ans. Ce sont ces personnalités qui tentent de faire surgir la Bête. Parmi les adolescentes retenues prisonnières, une héroïne se distingue : Casey.
Elle comprend rapidement qu'elle n'a pas en face d'elle un simple déséquilibré mais plusieurs personnages. Elle entreprend alors de demander à d'autres personnalités en opposition avec Dennis et Patricia de les aider à s'enfuir.