"Cassandre" : le premier film de la réalisatrice Hélène Merlin sur les horreurs de l'inceste intrafamiliale

À l'instar de La Familia Grande et du Consentement, adaptés au cinéma, le film Cassandre, en salles depuis le 2 avril, raconte l'omniprésence de l'inceste dans les cadres familiaux toxiques. Dans la famille de Cassandre, une jeune fille de 14 ans passionnée d'équitation qui grandit dans un manoir, les parents cultivent leur petit grain de folie.

Le père de l'adolescente, joué par Eric Ruf, militaire, exècre "les cons" qui l'entourent et mène son monde à la baguette. La mère (Zabou Breitman) est une ex-soixante-huitarde sans pudeur qui n'a pas vu que le monde avait changé depuis. Cassandre, interprétée par Billie Blain ("Le règne animal"), rêve d'échapper au huis clos familial. Son frère aîné, Philippe (Florian Lesieur), chouchou de son père, rentre d'un séjour d'échange aux États-Unis, où il a commencé à fréquenter des filles.

C'est dans ce milieu aisé que l'inceste va se produire. "L'inceste peut arriver partout. Dans ce climat familial, il y a beaucoup d'ambivalence, il y a aussi de l'affection, de la tendresse. La violence est un glissement qui arrive de façon subtile et sinueuse", a expliqué à l'AFP Hélène Merlin. La réalisatrice de 42 ans signe ainsi son tout premier film au cinéma, une autofiction qui lui a demandé un certain temps d'écriture.

Entre mineurs, le bourreau peut aussi être, à certains endroits, une victime.

La réalisatrice Hélène Merlin à l'AFP

"Dans les films ou dans les livres, je ne trouvais pas de représentation de ce que j'avais pu vivre, ce à quoi j'avais été confrontée", poursuit-elle, ajoutant s'être également nourrie des écrits de féministes comme Mona Chollet et Virginie Despentes, de psychologues et d'anthropologues. Raconté du point de vue de la jeune victime, le film montre "ce qu'elle peut ressentir", "les moments de dissociation" qui l'amènent à ne pas exprimer son refus, ajoute la réalisatrice.

Faire le choix de montrer l'inceste d'un frère sur une sœur au grand écran, "c'est plus compliqué pour le spectateur qu'entre un adulte et un enfant, où l'on sait tout de suite qui est le coupable et qui est la victime. Entre mineurs, le bourreau peut aussi être, à certains endroits, une victime", souligne-t-elle. Le film s'adresse à tous les publics, mais pourrait toucher particulièrement les adolescents, à l'image en 2023 de l'adaptation du livre "Le Consentement" de Vanessa Springora, à l'origine de l'affaire Matzneff.

"La parole s'est libérée, mais aussi l'écoute. Les adolescents ont plus de maturité que certains adultes. Ils ont moins peur de regarder ces problématiques qui les concernent, tandis que les adultes sont des boomers qui ont fait complètement partie de ce système de culture du viol, qui va du porno chic à Pretty Woman", affirme Hélène Merlin.