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Avec Google, il va falloir choisir entre l'intelligence artificielle et la vie privée

Google fait de l'intelligence artificielle la nouvelle porte d'entrée de son univers. À condition de lui céder le contrôle de vos données personnelles.

Google place l'intelligence artificielle au carrefour de son univers
Google place l'intelligence artificielle au carrefour de son univers
Crédit : Eric Risberg/AP/SIPA
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Benjamin Hue

Une conférence d'une heure et demi, ce n'est pas dans les habitudes de la maison. Mais quand la maison amorce un virage important de son histoire de fabricant matériel, ça vaut bien une rallonge. Loin du faste des keynotes d'Apple, Google a levé le voile mardi 4 octobre à San Francisco sur cinq produits, un smartphone, un casque de réalité virtuelle, un assistant domestique, un routeur WiFi et un streamer de flux vidéos en 4K. Ces appareils dessinent une nouvelle gamme "made by Google" prête à accueillir les progrès de l'intelligence artificielle du groupe, le maître-mot de la soirée. 

Signe de ce changement de régime, un cadre de l'entreprise avait assuré quelques jours auparavant que, huit ans après le lancement d'Android, le logiciel mobile de Google qui équipe aujourd'hui 80% des smartphones de la planète, on se souviendrait encore de ce 4 octobre 2016 dans huit ans. Calé sur le même braquet, le PDG de Google, Sundar Pichai, a donné le ton d'entrée de jeu, expliquant que le monde connaissait une nouvelle avancée et entrait pour dix ans dans l'ère de l'intelligence artificielle, avec, au carrefour de cette révolution, les services de Google.

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L'IA, nouvelle porte d'entrée dans l'univers Google

Lors de la conférence annuelle des développeurs Google I/O de mai 2013, Amit Singhal, vice-président du groupe, avait déroulé le futur de la recherche tel que le concevait Google. Selon lui, un moteur de recherche se devait de remplir trois missions : répondre, converser et anticiper. Trois ans plus tard, ces trois fonctions primaires se retrouvent au cœur de Google Assistant. Dévoilé en juin dernier, le successeur de Google Know se présente comme un assistant personnel numérique capable de répondre à toutes les demandes de l'utilisateur.

À l'inverse de Google Know, le logiciel ne se contente plus d'interagir avec lui mais s'adapte et anticipe désormais ses besoins. Il peut pour cela s'appuyer sur l'expertise de Google en matière de recherche et la gigantesque base de données du Knowledge Graph constituée par l'entreprise depuis 1998. Il bénéficie aussi des travaux de TensorFlow, sa technologie d'apprentissage automatique (le machine learning) avec des réseaux de neurones artificiels et peut s’enorgueillir de la puissance d'Alphago, première machine à triompher de l'homme au très complexe et cérébral jeu de go.

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L'objectif de Google est d'implanter son assistant numérique dans tous les produits et services du groupe. L'entreprise a fait un premier pas dans cette voie en lançant mi septembre Allo, la première messagerie instantanée utilisant Google Assistant. Ce dernier se sollicite par l'intermédiaire d'un chat de discussion et convoque au sein d'une même interface tous les services de Google. Trafic, transports, météo, actualité... Si l'utilisateur cherche une bonne table où passer la soirée, le logiciel lui suggère plusieurs adresses via Google Search, lui propose de téléphoner à l'établissement pour réserver, lui indique le trajet via Google Maps et peut inscrire le rendez-vous dans l'agenda. Tout ça sans jamais quitter le chat de la messagerie. Lorsque les développeurs tiers auront rendu compatibles leurs applications, il sera possible de commander un Uber pour s'y rendre. Nouvelle porte d'entrée de toutes les technologies du groupe, l'assistant de Google est tout naturellement installé d'office dans le Pixel, le premier smartphone conçu par ses soins, et entend bien conquérir les sphères les plus intimes avec la borne connectée Home.

Une intelligence omnisciente

Sous ses faux airs d’œuf de Pâques, Home renferme l'intelligence artificielle de Google et donne accès à tous les services du groupe par commande vocale. Doté de deux micros, il est capable de distinguer les bruits environnants des voix. Home est censé répondre à toutes sortes de demandes, des plus simples ("joue tel morceau") aux plus pratiques. Il peut fournir un itinéraire, élaborer une liste de courses, réserver un taxi, donner la météo, des résultats sportifs et toute autre requête à laquelle Google est en mesure de répondre. La borne est aussi un hub pour les objets connectés de la maison. Google a noué des partenariats avec de nombreux fabricants pour faire en sorte que Home puisse lancer une vidéo sur Netflix, une chanson sur Spotify ou contrôler les ampoules intelligentes Phillips Hue ou les prises SmartThings de Samsung. Capable de comprendre les instructions de plusieurs personnes, Home permet à Google d'être "universel et disponible dès que l'on en a besoin", a expliqué Sundar Pichai mardi.

Home est la réponse de Google à Amazon. Depuis deux ans, le géant du e-commerce vend son boîtier Echo avec son assistant personnel Alexa. À la surprise générale, il est devenu l'un des best-seller du groupe. Les analystes estiment que 3 millions d'appareils ont déjà été écoulés et tablent sur 10 millions à horizon 2017. Avec Home et Echo, Google et Amazon anticipent les prochains usages des consommateurs et misent sur le remplacement progressif de la recherche sur internet via un écran tactile de mobile par les commandes vocales. Pour un fonctionnement optimal, ces assistants à domicile doivent se nourrir des données personnelles de l'utilisateur. Ils doivent tout connaître de leur vie, de leurs habitudes de transports, de leur agenda et de leurs passe-temps favoris pour pouvoir être en mesure d'anticiper leurs besoins. Google, qui a construit son incroyable ascension sur l'exploitation des données personnelles et leur monétisation par la publicité, dispose de quelques longueurs d'avance sur ses concurrents dans cette bataille.

Une autre voie est possible

Mais le modèle proposé par le géant de Mountain View soulève aussi des interrogations majeures. Google a beau clamer "Don't be evil" ("ne soit pas malveillant") comme un slogan depuis deux décennies , sa vision de l'intelligence artificielle place l'utilisateur face à un dilemme. L'histoire de l'informatique atteint en quelque sorte un point de basculement à l